La Gestion Intégrée des Inondations est un principe largement affiché, mais dans la pratique il demeure difficile de concilier les objectifs de réduction de dommages et de préservation de l'environnement. Trop souvent, les biologistes sont appelés pour donner leur avis sur un projet déjà ficelé techniquement ; il est alors délicat de faire des modifications majeures. Nous plaidons donc pour la co-conception des aménagements, dans laquelle toutes les compétences seraient mises à contribution afin de proposer le meilleur compromis, adapté aux cahier des charges et au contexte local. Dans un travail de co-conception, les spécialistes doivent travailler ensemble ; or, en règle générale, leurs compétences, langages et objectifs sont différents. Nous proposons donc d'utiliser la notion de "riverscapes", ou paysages aquatiques, pour définir le contexte naturel et les effets attendus des aménagements. Il s'agit de définir une typologie hiérarchisée de riverscapes, qui va inclure les descriptions biologique et géomorphologique, en précisant les processus et fonctions de chaque type. Il ne s'agit pas d'apporter de nouvelles connaissances, mais de formaliser à l’adresse des autres spécialistes intervenant dans le projet les connaissances existantes nécessaires et suffisantes pour amorcer des discussions techniques. Ces types seront une référence pour caractériser l'état naturel et l'évolution que l'aménagement lui fera subir. En parallèle, les contraintes hydrologiques et de génie civil seront explicitées ; il restera donc à choisir, tout au long du tronçon, les solutions techniques respectant ces contraintes et dégradant le moins le niveau de riverscape. Ensuite, les riverscapes "de référence" choisis en commun servent de base pour réfléchir à des améliorations locales, en fonction du contexte naturel et des possibilités techniques. Nous avons développé la réflexion, d'abord limitée à des ouvrages ponctuels comme les barrages à pertuis ouvert, à des schémas plus larges. Les riverscapes doivent alors être plus complexes, incluant davantage de variables, et avec plusieurs types de niveau équivalent : on ne cherchera plus alors seulement le "meilleur type possible" par tronçon, mais il faudra également encourager la diversité par l'hétérogénéité de types équivalents. Notre approche et son cadre conceptuel ayant été validés par deux publications scientifiques, nous préparons une application pour le Syndicat du bassin versant de l'Odet, le Sivalodet. Cette mise en pratique sera l'occasion d'observer comment des intervenants de compétences diverses vont s'approprier la méthode et la mettre en pratique ; cela nous permettra de formuler la méthode pour la transférer efficacement aux opérationnels.