Avec les difficultés de l'agriculture et la montée des préoccupations territoriales en matière de sécurité alimentaire, se sont multipliées les actions en faveur du développement des Circuits Courts et de Proximité (CCP). Ces derniers se définissent comme des modes d'organisation des filières agricoles qui raccourcissent la distance relationnelle et géographique entre producteurs et consommateurs (Fénéchère et al., 2008 ; Chevallier et al., 2013). Ces actions émanent aussi bien des producteurs que des consommateurs, des organisations professionnelles agricoles que des territoires. Ces circuits sont envisagés comme moyens d'atteindre des objectifs de durabilité aussi bien pour les producteurs que pour les consommateurs et les collectivités localisées (Traversac, 2011 ; Maréchal, 2008). Les attentes sont fortes. Du côté des exploitations agricoles, il est attendu de ces circuits une amélioration de la situation économique et de la transparence quant à la qualité, l'origine et le prix des produits pour les consommateurs, ainsi que l'existence d'un lien entre producteurs et consommateurs sur un même territoire (IUFN, 2012). Ces effets positifs des CCP restent toutefois sans réelle évaluation et les acteurs porteurs ou accompagnateurs de ces systèmes restent sans moyens de pouvoir évaluer et démontrer l'efficacité de leurs actions. Pourtant, sur de nombreux territoires se développent de multiples initiatives, preuves d'un réel engouement pour les CCP (Ademe, 2017). Cette communication s'intéresse donc à l'évaluation et à l'analyse du rôle que jouent les CCP dans la performance globale des exploitations agricoles qui les développent pour la vente de leurs productions. Elle a pour objectif non pas l'évaluation de la performance d'exploitations en CCP, mais plutôt d'apporter un éclairage concernant la contribution de l'engagement dans une démarche de vente en CCP à la performance globale des exploitations agricoles concernées. Autrement dit, il s'agit de se demander en quoi le caractère de circuit court et de proximité contribue in fine à la performance économique et plus largement à la performance globale des exploitations commercialisant en CCP, en se plaçant du point de vue des acteurs. Pour cela, une étude bibliographique a tout d'abord été menée afin d'identifier les effets possibles et probables de la commercialisation en CCP sur la performance des exploitations à partir (i) d'articles théoriques, (ii) d'études sur des cas spécifiques (type de CCP, filière, région) et (iii) de retours d'expériences. Cette étude a permis d'aboutir à 20 hypothèses relevant aussi bien de l'échelle des exploitations elles-mêmes, que des filières ou des territoires. Elles ont été classées selon leur thématique en différentes catégories dont Dynamique et ancrage territorial, Autonomie, Organisation du travail, Diversification, Valorisation économique et sociale, Respect de l'environnement, Innovation, Production, Impact global, Bien-être humain et Compétences. La méthodologie développée repose sur des entretiens semi-directifs auprès d'exploitants agricoles, élaborés afin de faire exprimer par les agriculteurs leur perception du rôle des CCP dans la performance globale de leurs exploitations, et ce pour 3 filières emblématiques de l'ancienne région Aquitaine : la filière ovins lait, la filière bovins viande et la filière maraîchage. 48 entretiens ont ainsi pu être menés sur le territoire de l'ancienne région en 2017 et 2018. Ce travail a en effet bénéficié d'un financement dans le cadre du programme PSDR Perfecto (Performance des circuits courts et de proximité et Territoires, 2016-2020, coord. Nathalie Corade) portant sur l'ancienne région Aquitaine. Il ressort de l'analyse plusieurs résultats toutes filières confondues : - Nous distinguons dans le discours des exploitants des Conditions à la performance des exploitations en CCP, ainsi que des Critères de performance et des Effets sur la performance des exploitations ; - Certains des effets des CCP sur la performance globale des exploitations ne sont pas discutés dans la littérature mais révélés par les acteurs, comme par exemple l'importance de la participation des producteurs à la dynamique locale et collective autour des CCP sur leurs territoires. Ceci nous a amenés à compléter les hypothèses issues de la littérature (+4) ; - Un des résultats majeurs repose sur la dimension territoriale des CCP. Pour quasiment tous les enquêtés, la contribution des CCP à la performance globale des exploitations dépend grandement de la dynamique locale existant sur le territoire. Même s'il n'est pas impossible d'être performant sur des territoires isolés en termes de développement des CCP, l'appartenance à un territoire dynamique pour les CCP (hors politiques publiques) est un facteur de performance pour les exploitants (innovation sociale, dynamique sociétale locale, appartenance à des réseaux locaux et professionnels) ; - D'autres effets se situent plutôt à l'échelle des exploitations. Les CCP permettent par exemple, comme attendu, de maintenir et assurer la viabilité économique des exploitations en CCP ; - Enfin, les producteurs ne font aucun lien entre CCP et performance environnementale de leurs exploitations, ni entre processus d'innovation et commercialisation en CCP.