La babésiose humaine : bilan de 10 ans d'analyses
Résumé
[u]Introduction[/u] : Dans le groupe des maladies transmises par les tiques, la Babésiose est due à Babesia, un parasite sanguin Apicomplexe proche de Plasmodium. L'homme ne représente qu'un hôte accidentel de Babesia spp., les différentes espèces identifiées chez l'homme étant toutes zoonotiques. En Europe, B. divergens est inféodé aux bovins et Babesia sp. EU1 (B. venatorum) aux chevreuils, tandis que B. microti est inféodé aux rongeurs, principalement aux USA. En Europe, la même tique, Ixodes ricinus, transmet les deux espèces de Babesia. Le tableau clinique est très différent aux USA et en Europe : aux USA, la babésiose humaine est très largement répandue sur patients immunodéprimés ou non avec un tableau clinique modéré ; elle est rare mais sévère en Europe sur individus immunodéprimés uniquement. Quelques cas modérés sur individus immunocompétents sont rapportés. [u]Matériels et Méthodes[/u] : Entre 2005 et 2014, 4694 analyses sérologiques de babésiose humaine à B. divergens par Immunofluorescence indirecte ont été réalisées. La lecture étant délicate, elle est réalisée en double aveugle, et tout résultat discordant est ré-évalué. En 2014, la technique a été transférée vers un laboratoire privé. La détection par PCR nichée et l'identification moléculaire sans a priori des espèces de Babesia présentes dans le sang ont été réalisées sur un échantillon de prélèvements pour comparer résultats sérologiques et détection moléculaire. [u]Résultats[/u] : Depuis 2005, le nombre d'analyses sérologiques demandées a augmenté, passant de 1 à plus de 2000 en 2014. Les cas analysés ne correspondent pas à une population représentative, car les analyses concernent des patients avec historique de morsure de tiques, ou diagnostiqués positifs pour la maladie de Lyme ou souffrant de symptômes tels que fatigue chronique, migraine, fièvre récurrente, vertige. L'échantillon comporte 2/3 de femmes, et la majeure partie des analyses concerne les tranches d'âge 20-40 et 40-60 ans. La séroprévalence moyenne sur 10 ans est de 36,7% (1721/4694), en augmentation depuis 10 ans, avec des titres allant du 1/8 au 1/512. Des titres supérieurs à 1/16 ont été mesurés pour près de la moitié des cas séropositifs. Par contre, les analyses moléculaires ne permettent que très rarement de détecter le parasite. Dans les quelques cas positifs, seule l'espèce courante en Europe, B. divergens, a été mise en évidence. [u]Conclusion[/u] : Les analyses sérologiques indiquent une forte prévalence de la babésiose humaine à B. divergens en France. Elle n'est pas corrélée avec le taux de détection moléculaire du parasite chez les patients, qui demeure très faible. La sérologie apporte une indication de contact de B. divergens avec le patient, qui étant le plus souvent immunocompétent élimine le parasite. Si le parasite persiste, c'est souvent à bas bruit, avec une localisation préférentielle dans les capillaires sanguins, rendant sa détection difficile. La mise au point de techniques de détection rapides et sensibles des Babesia zoonotiques chez l'homme est une nécessité.