Projet FRéGAlim. Quelles incitations pour favoriser la réduction du gaspillage alimentaire en foyer : information et sensibilisation ou modification d’éléments de l’offre (promotions) ? - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport Contrat/Projet) Année : 2016

Projet FRéGAlim. Quelles incitations pour favoriser la réduction du gaspillage alimentaire en foyer : information et sensibilisation ou modification d’éléments de l’offre (promotions) ?

Résumé

L’objectif de ce projet est d’analyser l’efficacité d’incitations qui visent à réduire le gaspillage en foyer, pour proposer des pistes d’action. Ce projet s’intéresse plus particulièrement aux campagnes de communication d’une part, et aux incitations relatives aux offres promotionnelles d’autre part. Plusieurs enquêtes et travaux scientifiques ont montré qu’en moyenne les personnes interrogées estiment gaspiller moins que leurs concitoyens. Cette sous-estimation de son propre gaspillage soulève la question de l’efficacité des campagnes de sensibilisation. Les travaux ont cherché, d’une part, à mieux comprendre les causes possibles de cet écart entre comportement déclaré et comportement réel, et, d’autre part, à tester l’efficacité de campagnes de communication. Une première recherche s’est intéressée à l’écart entre comportement réel et comportement déclaré en restauration hors foyer, en s’appuyant sur un couplage d’une pesée des déchets et d’une enquête sur un échantillon de plus de 600 personnes. Les résultats montrent que, toutes choses égales par ailleurs, les hommes ont plus de deux fois plus de chances que les femmes de nier avoir laissé des restes sur leur plateau, ce que nous expliquons par des stéréotypes marqueurs de l’identité sexuelle. L’écart entre comportement réel et comportement déclaré est d’autant plus important que la quantité laissée est faible. La norme descriptive a également un effet puisque, toutes choses égales par ailleurs, un convive qui pense que la majorité des convives va finir leur plateau a presque deux fois plus de chances de nier laisser des restes sur son plateau qu’un convive qui pense que la majorité des convives ne consomme pas l’intégralité de son plateau. Enfin, le fait d’être satisfait ou très satisfait du goût du repas contribue également à accroître la probabilité d’écart entre comportement réel et observé. Une deuxième explication de la sous-déclaration de gaspillage réside dans la définition que les consommateurs donnent au terme gaspillage. Ainsi, une enquête auprès d’un échantillon de 1200 personnes, représentatif de la population française, établit que la qualification d’un acte comme « gaspillage » dépend de l’utilisation qui est faite du produit alimentaire. Ainsi donner des restes consommables à un animal ou les mettre au compost est moins fréquemment perçu comme étant du « gaspillage » que lorsque ces mêmes restes sont jetés à la poubelle. Ce résultat souligne la nécessité de réfléchir à l’articulation de la communication visant à promouvoir le compostage, et de celle visant à promouvoir la réduction du gaspillage alimentaire. La réaction des consommateurs à des campagnes de sensibilisation a d’abord été étudiée au travers d’entretiens qualitatifs. Lorsque les consommateurs sont confrontés à une campagne disant qu’il ne faut pas gaspiller, alors qu’il leur arrive de gaspiller, ils sont confrontés à une dissonance entre leurs convictions et leurs actes. La théorie de la dissonance cognitive de Festinger montre que de telles dissonances génèrent un inconfort psychologique pour les individus, et qu’ils cherchent alors à réduire cette dissonance. Dans le cas du gaspillage alimentaire, nos entretiens montrent les différentes stratégies adoptées par les consommateurs pour réduire la dissonance entre information sur le gaspillage et comportement de gaspillage ; on observe ainsi des stratégies d’évitement, de décrédibilisation, d’interprétation, de recherche d’information, de trivialisation ou d’hypocrisie. Une enquête quantitative auprès d’un échantillon représentatif de 1200 personnes étudie ensuite les réactions à deux communications très courtes promouvant la réduction du gaspillage alimentaire. Les premières statistiques descriptives montrent qu’une majorité de personnes réagit par une intention de changement de comportement. Dans un deuxième temps, la technique dite du pied dans la porte (communication engageante) est utilisée auprès d’un échantillon d’environ 200 personnes pour promouvoir l’adoption de « gestes anti-gaspi » en foyer. L’effet contreproductif de la communication engageante, dans le cas particulier étudié, implique que le design retenu pour cette action de communication engageante doit être revu ; mais cela ne remet pas en cause l’intérêt de s’appuyer sur la communication engageante. Parmi les différents facteurs susceptibles d’influencer les comportements individuels concernant le gaspillage, ce projet a défini et proposé une mesure de la « sensibilité au gaspillage alimentaire», qui correspond au fait d’accorder de l’importance au gaspillage alimentaire et à ses conséquences. Pour ce faire, la recherche s’est appuyée sur des entretiens qualitatifs, puis deux enquêtes successives. La sensibilité au gaspillage alimentaire inclut deux dimensions, l’une individuelle (qui inclut l’attitude individuelle envers le gaspillage et les normes morale et sociale vis-à-vis du gaspillage alimentaire), l’autre globale (qui correspond à la conscience des conséquences globales du gaspillage alimentaire). Ces deux dimensions de la sensibilité au gaspillage alimentaire, bien que différentes, sont fortement liées. Une enquête conduite auprès d’un échantillon de 1018 personnes, représentatif de la population française, analyse l’effet de la sensibilité au gaspillage sur l’adoption de pratiques anti-gaspillage ; et étudie également l’impact de différentes variables sur la sensibilité au gaspillage alimentaire. La sensibilité au gaspillage alimentaire est un médiateur de l’effet de la préoccupation pour le pouvoir d’achat, l’implication pour l’alimentation et l’éducation dans le domaine de l’alimentation sur la fréquence d’adoption de pratiques anti-gaspillage. De plus, la sensibilité individuelle a un impact plus important sur les comportements que la sensibilité globale. Ce résultat souligne l’intérêt pour les pouvoirs publics de s’appuyer sur cette sensibilité individuelle, et de jouer donc plutôt sur des préoccupations d’ordre personnel pour inciter les consommateurs à moins gaspiller. En particulier, la préoccupation pour le pouvoir d’achat a un effet important sur l’adoption de comportements anti-gaspillage. Le faible impact de la sensibilité globale souligne que des campagnes de communication très orientées sur les conséquences globales du gaspillage alimentaire ont moins de chances de succès. Un des résultats contre-intuitifs de ce travail est que l’implication pour l’alimentation a des effets contrastés sur la fréquence de jets de restes, avec un effet direct positif et un effet indirect (via la sensibilité au gaspillage) négatif, la somme de ces deux effets étant nulle. Ainsi, accroître l’implication pour l’alimentation n’est pas nécessairement positif pour le gaspillage alimentaire. Il convient donc d’associer des actions anti-gaspillage aux actions visant à accroître l’implication pour l’alimentation. Les préoccupations des consommateurs liées au gaspillage alimentaire, et l’identification des promotions en quantité (et en particulier du « Buy One Get One Free » BOGOF) comme un facteur de gaspillage, ont conduit les distributeurs à proposer de nouveaux formats de promotion. Cependant aucune recherche ne s’est intéressée jusqu’à présent à l’influence de la probabilité de non consommation et de la sensibilité au gaspillage sur l’attitude envers une promotion et le choix d’articles en promotion. La dernière partie de ce projet se consacre ainsi à cette question. A partir de deux enquêtes (auprès de 422 et 404 personnes), la perception de différents types de promotion (1 acheté, le 2ème à 50% ; 1 acheté+1 gratuit ; 2 achetés+1 gratuit ; 1 acheté +1 gratuit à venir chercher plus tard) ainsi que les choix effectués entre différentes promotions sont étudiés pour deux produits : le pain et le fromage. Pour ces deux produits, l’attitude envers la promotion dépend positivement de la sensibilité aux promotions, mais également négativement de la probabilité perçue de gaspillage du produit, et de l’implication/familiarité avec ce produit. La sensibilité individuelle au gaspillage alimentaire a un effet positif sur la sensibilité aux promotions, ce qui s’explique par les préoccupations individuelles financières qui sous-tendent la sensibilité individuelle au gaspillage alimentaire. L’analyse des choix entre les promotions montre tout d’abord que l’attitude envers la promotion et la probabilité perçue de non consommation influencent le choix : plus la probabilité de non consommation est perçue comme élevée, moins la promotion est choisie. Ce résultat souligne la nécessité, pour les distributeurs de trouver de nouveaux formats de promotion. Dans le même temps, la promotion 1 acheté+1 gratuit à venir chercher plus tard ne rencontre pas un grand succès, les consommateurs préférant d’autres formats de promotion soit par manque de confiance dans le distributeur, soit par crainte de n’être pas en mesure de revenir chercher le produit. La proposition de nouveaux formats de promotion doit ainsi notamment s’accompagner d’une communication auprès des consommateurs pour les rassurer sur la disponibilité future du produit.
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2016_Costa_Fregalim_1.pdf (2.82 Mo) Télécharger le fichier
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)
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Dates et versions

hal-02800548 , version 1 (05-06-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02800548 , version 1
  • PRODINRA : 380099

Citer

Sandrine Costa, Lorraine Balaine, Margot Dyen, Guillaume Le Borgne, Madline Rivière, et al.. Projet FRéGAlim. Quelles incitations pour favoriser la réduction du gaspillage alimentaire en foyer : information et sensibilisation ou modification d’éléments de l’offre (promotions) ?. [Contrat] 2016. ⟨hal-02800548⟩
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