Dans cet exposé, je présenterai et discuterai des implications éthiques des biobanques pour les animaux domestiques, en mettant l’accent sur la manière dont l’éthique peut éclairer la manière dont ces infrastructures sont utilisées et gérées. Par rapport aux biobanques humaines, la collecte de gamètes d'animaux, d'échantillons de tissus ou d'ADN ne semble pas être à première vue une activité susceptible de soulever d’importantes questions éthiques. Et pourtant, les biobanques pour les animaux domestiques engagent une variété d’activités dont les implications dépassent très largement les strictes considérations scientifiques, techniques et réglementaires : elles engagent également en effet de multiples implications sociales, économiques, politiques et enfin éthiques. Je montrerai dans cet exposé que les biobanques pour les animaux domestiques incorporent par exemple différentes conceptions de l'avenir des ressources génétiques animales et de l'agriculture en général, suggèrent et/ou instaurent des relations particulières entre la recherche et l'industrie, intègrent des conceptions particulières du vivant, des animaux, des éleveurs, des technologies et de la manière dont elles devraient être utilisées au regard de la nature et de l’ampleur des enjeux. Pour ce faire, je m'appuierai sur une présentation et une discussion des résultats d'une enquête sur les enjeux éthiques des biobanques pour les animaux domestiques en Europe, réalisée dans le cadre du projet Horizon 2020, IMAGE, en étroite collaboration avec CRB‐Anim pour le volet français. L'enquête par questionnaire a été lancée en 2018. Elle a été distribuée aux participants de diverses réunions et manifestations concernant les cryobanques et la conservation des ressources génétiques animales. 159 réponses d’acteurs aux profils variés (scientifiques, étudiants, gestionnaires de cryobanques, etc) ont été recueillies. Le questionnaire était organisé en 3 sections principales : la section 1 visait à recueillir des informations générales sur les compétences et le domaine d'activité des répondants ; la section 2 abordait les motivations des répondants pour la conservation des ressources génétiques animales, les processus de décision souhaité pour la gestion des échantillons, l’équilibre possible entre la cryoconservation et la conservation in situ ; la section 3 traitait de l'acceptation des innovations techniques associées au stratégies de conservation des ressources génétiques animales. Les principaux résultats de ces trois sections seront présentés, discutés et complétés par des résultats qualitatifs issus de deux études ethnographiques conduites par observation et entretiens semi‐directifs auprès de gestionnaires de biobanques européennes, d’une part, et d’éleveurs français pratiquant la conservation in situ, d’autre part. Cet exposé se terminera par une discussion sur la manière dont les infrastructures de conservation des ressources génétiques animales tel que CRB‐Anim et les innovations biotechnologiques associées transforment les différentes manières éthiques d’appréhender l'avenir des ressources biologiques.