Les chèvres à peine domestiquées ont été introduites en Corse au Néolithique ancien et cette longue histoire commune a permis de construire des activités ancrées culturellement et économiquement dans le territoire de l’île. La chèvre est l’animal pastoral par excellence et nous décrivons comment les pratiques pastorales, fondées sur la valorisation de la diversité des ressources spontanées sont à la base des systèmes d’élevage caprin jusqu’à la fin du 19è(XIXème) siècle. Nous montrons ensuite comment l’implantation de Roquefort et l’intégration de la Corse au modèle de la brebis à l’herbe a contribué à la marginalisation et à la stigmatisation de la chèvre qui a régressé de manière irrégulière mais continue jusque dans les années 1970. La race caprine corse, les pratiques de sélection, ses facultés d’adaptation à un éco – système si particulier sont décrites à travers la culture technique qui leur est liée. Les caractéristiques de la chèvre corse et les règles de conduite des systèmes de production éclairent à la fois les performances présentes de l’élevage caprin et les conditions d’exercice du métier. L’élevage caprin corse est à l’origine de productions traditionnelles à forte typicité (fromages, brocciu, cabris, etc…) aujourd’hui reconnues et recherchées. Alors que la Corse fait face à un ensauvagement préoccupant de ses espaces naturels avec une recrudescence dramatique des risques d’incendie, la timide relance à laquelle on assiste ne pourra se consolider que si l’ensemble des acteurs renforce leur mobilisation actuelle pour proposer des modèles pastoraux stabilisés, répondant aux attentes des éleveurs d’aujourd’hui sans être la pâle imitation de modèles intensifs qui tendent partout à être remis en question. Le patrimoine caprin est à l’origine d’un regain d’intérêt récent pour l’élevage de chèvre et suscite des attentes fortes de la part d’un noyau de jeunes éleveurs motivés aussi bien que des autorités régionales.