La production des données naturalistes par les amateurs associatifs en France : un moyen ou une fin en soi ?
Résumé
Considérés comme les principaux pourvoyeurs de données sur la nature en France, les associations naturalistes ont largement contribué à la préservation du patrimoine naturel. Cependant, la globalisation des enjeux de biodiversité marque un tournant dans la manière de gouverner le vivant. Celle-ci est désormais fondée sur la production et l’accumulation de données à grande échelle et la mise en place d’infrastructures de la connaissance (Edwards, 2013). Afin de rendre compte de ces changements et de leurs conséquences pour les associations nous examinerons le processus de production des données au sein du monde associatif d’une part et la mise en œuvre d’un dispositif baptisé système d’information sur la nature et les paysages (SINP) d’autre part. Ce dernier destiné à standardiser les données doit faciliter leur accès et contribuer à favoriser la participation des citoyens à la décision publique (convention d’Aarhus). À partir d’une approche socio-anthropologique, nous montrerons tout d’abord que ce dispositif conduit à mettre en lumière deux conceptions de la donnée qui disposent chacune de leur légitimité mais témoignent de formes différentes de rapports à la nature et questionne les fondements de la production des données. Nous examinerons ensuite en quoi ce dispositif technoscientifique recourt à une expertise complexe qui reconfigure les savoirs et les formes de pouvoir entre les institutions concernées.