Intérêt du dupilumab dans les eczémas sévères associés aux déficits immunitaires primitifs
Abstract
Introduction
Les déficits immunitaires primitifs (DIP) sont parfois associés à des eczémas sévères difficiles à traiter. Le syndrome de Wiskott–Aldrich est un DIP lié au chromosome X, associé à des mutations du gène WAS et caractérisé par une microthrombocytopénie, un eczéma, des infections récurrentes et une incidence accrue d’auto-immunité et de tumeurs malignes. Le syndrome hyper-IgE est associé à des mutations hétérozygotes du gène STAT3 et se caractérise par des abcès cutanés récurrents, des infections fungiques, des manifestations allergiques à début précoce, un eczéma sévère et des pneumopathies bactériennes. Nous rapportons 2 observations de DIP traités par dupilumab pour eczéma sévère.
Observations
Un patient de 17 ans était suivi pour un syndrome de Wiskott–Aldrich associant une thrombopénie, un purpura chronique et un eczéma sévère mal contrôlé par les dermocorticoïdes. Il recevait un traitement par oracilline, sulfaméthoxazole-triméthoprime, immunoglobulines intraveineuses. Un traitement par dupilumab était débuté fin septembre 2020. Après 2 ans de traitement, la tolérance était excellente et le patient était répondeur partiel stable (amélioration de 50% du score SCORAD initial).
Un patient de 43 ans était suivi pour un syndrome hyper-IgE (mutation hétérozygote c.995A>G du gène STAT3). Il souffrait d’un prurit chronique majeur depuis l’enfance et d’un prurigo excorié sévère des quatre membres et du cuir chevelu compliqué d’infections cutanées récurrentes, résistant aux traitements locaux et immunosuppresseurs conventionnels de l’eczéma. Un traitement par dupilumab était débuté en octobre 2021 avec une excellente tolérance et une rémission complète à 6 mois (disparition du prurit, cicatrisation de 90 % des excoriations).
Discussion
Le dupilumab est un anticorps monoclonal IgG4 humanisé qui cible la chaîne alpha du récepteur de l’IL-4. Son profil de tolérance à moyen terme est bien connu dans les essais et en vie réelle chez l’immunocompétent atteint de dermatite atopique. Il n’est pas rapporté de sur risque infectieux contrairement aux autres traitements systémiques (notamment la ciclosporine). Ces dernières années, 19 cas de syndrome hyper-IgE traités par dupilumab ont été rapportés dans la littérature. Aucun cas ne fait mention d’infection au cours du traitement ce qui laisse penser qu’en raison de son mode d’action ciblé, le dupilumab n’aggrave pas le risque d’infection au cours de ce DIP. En revanche, aucun cas de syndrome de Wiskott–Aldrich traité par dupilumab n’a été rapporté dans la littérature. La bonne tolérance à 2 ans chez notre patient est rassurante.
Le rapport bénéfice risque du dupilumab semble être favorable au cours des DIP avec eczéma modéré à sévère mal contrôlé par le traitement local.