Les propriétés des tissus musculaires et adipeux constituent des éléments majeurs pour la qualité des carcasses et des viandes. Des données bibliographiques principalement chez le mouton, montrent que l’alimentation des mères au cours de la période foetale peut avoir des conséquences sur le développement de ces tissus encore visibles au stade adulte. Très peu de données sont disponibles chez le bovin. Aussi, l’objectif de cette étude était de préciser l’influence de modifications de l’alimentation des mères à différents stades de gestation, sur l’ontogenèse des tissus musculaires et adipeux. Trois lots de vaches gestantes recevant des régimes différents entre 30 et 140 jours de gestation ont été constitués (CC : 100% des apports recommandés, RC: 60% des apports recommandés de 30 à 85 jours puis 100%, RR : 60% des apports recommandés de 30 à 140 jours). De 140 à 254 jours les vaches des trois lots ont reçu 100% des apports recommandés (lots CCC, RCC, RRC). Cinq vaches par lot ont été abattues à 85, 140 et 254 jours de gestation. Les muscles Semitendinosus et Longissimus thoracis et les tissus adipeux perirénal et omental ont été prélevés aux trois âges. Sur le Semitendinosus la surface et le nombre de fibres musculaires ont été mesurées par histochimie. La proportion des différents types de fibres a été déterminée à l’aide d’anticorps spécifiques de différentes isoformes de chaînes lourdes de myosines (MyHC) et par séparation de ces isoformes par électrophorèse. Les principaux résultats ont montré une plus faible proportion de petites fibres exprimant l’isoforme MyHC foetale dans les deux lots RRC et RCC par rapport au contrôle. Ces fibres correspondent à la troisième génération de myoblastes à l’origine des fibres IIA. De plus, les protéines des 4 tissus prélevés à 140 jours ont été extraites et séparées par électrophorèse bidimensionnelle. A partir des spots révélés, les effets du stade de développement, du tissu et de l’alimentation et les interactions respectives, ont été analysés. Les abondances de 28 protéines musculaires et de 34 protéines adipeuses ont été modifiées (P <0,10) par la nutrition maternelle. Dans les deux tissus, elles sont principalement impliquées dans la glycolyse, le cycle de Krebs, des processus métaboliques liées à la synthèse des protéines, et la régulation négative de l'apoptose. Des protéines jamais identifiées par exemple dans le muscle, CCT6A, VBP1, UBE2N ... ont été proposées comme des protéines centrales pour la myogenèse par une étude bioinformatique réalisée avec notre webservice récemment développé ProteINSIDE (http://www.proteinside.org, Kaspric et al., 2015). Au moins dans le muscle Semitendinosus, certaines des protéines identifiées à 140 jours pourraient avoir contribué au retard de la différenciation des fibres IIA ou à la prolifération inférieure de la troisième génération de myoblastes chez les foetus de 254 jours issus de vaches restreintes. Enfin cette étude est la première décrivant un protéome aussi riche (environ 700 protéines par tissu) chez le foetus bovins.