La conciliation des intérêts de l'hydroélectricité et des intérêts écologiques des cours d'eau, respectivement prônés par les directives européennes SER (développement d'énergie renouvelable) et DCE (entre autre restauration de la continuité écologique), nécessite de limiter voire d'annuler les dommages liés à la dévalaison des poissons au niveau des centrales hydroélectriques. Cela passe impérativement par la prise en compte dés la conception des prises d'eau, non seulement des contraintes hydrauliques et mécaniques, mais aussi des contraintes biologiques liées à la dévalaison des poissons. La problématique de dévalaison concerne essentiellement les espèces migratrices diadromes, pour lesquelles la migration de dévalaison est indispensable à l'accomplissement de leur cycle de vie, et qui sont sujettes au cumul des impacts car dévalant sur des distances importantes. Parmi elles, sont particulièrement concernés les juvéniles (smolts) de saumon atlantique et de truite de mer dévalant depuis les parties hautes des bassins versants, ainsi que les anguilles dévalant au stade adulte (anguille argentée)subissant les plus fortes mortalités au passage par les turbines. Pour ces espèces, les objectifs de survie doivent être fixés à des valeurs de 100% ou très proches pour limiter l'impact cumulé sur les axes de migration. A l'heure actuelle, la dévalaison ne semble pas problématique pour les espèces potamodromes, hormis le cas particulier des populations de truites au niveau des prises d'eau de montagne par en dessous. Parmi les solutions aux problèmes de dévalaison, la construction de prises d'eau ichtyocompatibles avec un dispositif de dévalaison semble la plus généralisable, en particulier aux centrales existantes ; les deux autres solutions étant l'arrêt des turbines ou la mise en place de turbines ichtyocompatibles. Un dispositif de dévalaison doit permettre (1) d'arrêter les poissons et les empêcher ainsi de passer par les turbines, (2) de les guider vers un système de transfert vers l'aval et (3) de les faire passer à l'aval sans dommages. Parmi les différents dispositifs, les plans de grilles inclinés associés à un ou plusieurs exutoires sont le type de dispositif le plus à même de constituer une solution multispécifique efficace. Deux configurations sont envisageables : · Soit un plan de grille quasi vertical mais incliné par rapport à la direction de l'écoulement ; l'exutoire est alors positionné à l'extrémité aval du plan de grille. Dans le cas d'un long plan de grille, des exutoires intermédiaires peuvent être installés. · Soit un plan de grille très incliné par rapport à la verticale et disposé perpendiculairement à l'écoulement ; le ou les exutoires sont alors positionnés au sommet du plan de grille. Les critères biologiques de dimensionnement portent sur : · L'espacement libre maximal entre les barreaux. En l'état des connaissances, il est préconisé d'adopter un espacement maximal de 2.5 cm pour les smolts de saumon atlantique et de truite de mer (barrière comportementale) et un espacement maximal de 1.5 cm pour les anguilles (barrière physique pour les individus de taille supérieure à 50 cm environ et comportementale sinon). · La vitesse normale au plan de grille maximale, égale à 50 cm/s pour les smolts et les anguilles, le colmatage partiel de la grille devant être pris en compte. · L'inclinaison minimale du plan de grille, selon la configuration : 26° par rapport à la verticale ou 45° par rapport à la direction de l'éc oulement (attention aux conventions de mesure des angles). · Le débit minimal transitant dans l'exutoire de 2 à 10% du débit maximum turbiné et ses dimensions minimales égales à 0.50 m pour la largeur et la hauteur d'eau déversante. Ces critères ; en particulier vis-à-vis de l'anguille, restent expérimentaux et sont susceptibles de s'affiner au regard des résultats des expérimentations futures. L'exploitation des plans grilles fines est techniquement possible à condition de veiller à ce que les conditions hydrauliques à l'approche soient bonnes (vitesses d'approche homogènes) et que le système de dégrillage soit adapté au type de détritus et correctement dimensionné. L'acquisition de retour d'expérience à partir de la réalisation et du suivi de projet-pilotes constitue la prochaine étape pour progresser dans la conception des prises d'eau ichtyocompatibles.