Le Rhône est le quatrième fleuve européen et son bassin versant correspond au quart du territoire français. Depuis la seconde partie du 19ème siècle, le bassin versant, le corridor fluvial et le chenal ont subit des transformations, qui ont modifié radicalement la production et le transfert des sédiments. Quelques chiffres suffisent à illustrer les profondes modifications sédimentaires que connaît ce grand fleuve depuis quelques décennies. En 1950, le Rhône charriait 1 Million m3.a-1 de sables et graviers ; la valeur actuelle est estimée à 0,2 Million m3.a-1. Cette chute est liée d'une part à une extraction massive de matériaux alluvionnaires et d'autre part, à une disparition progressive de la torrentialité du bassin versant. Le 20ème siècle correspond donc à une mutation considérable des conditions d'alimentation, puis de transfert et de stockage sédimentaires, qui modifient la nature des aléas et des contraintes de l'occupation du sol à proximité du fleuve. C'est dans ce contexte de crise sédimentaire majeure que s'inscrit cette étude dédiée à la compréhension des liens étroits entre flux sédimentaires fluviatiles et polluants métalliques et organiques. Surimposée à cette pénurie de sédiments, la présence de contaminants hydrophobes dans les sédiments du Rhône implique la mise en ½uvre de programmes de recherche permettant de comprendre l'évolution séculaire et décennale de ces polluants. Quatre sites, situés sur le Rhône, en aval et en amont de l'agglomération lyonnaise ont fait l'objet de carottages courts. Les séquences ont été prélevées dans des environnements fluviatiles ayant archivé l'histoire récente des flux sédimentaires et des contaminants associés. Les comptages gamma (Césium et Plomb 210) ont permis d'établir une chronologie précise de la dynamique fluviatile. L'archivage exhaustif des crues constitue également un complément de calage du modèle d'âge. La susceptibilité magnétique et les mesures granulométriques autorisent une reconstitution du fonctionnement hydro-sédimentaire du Rhône à l'échelle annuelle. Les changements de texture, de flux ainsi que l'image de Passega sont des proxies sédimentaires sensiblement affectés par les aménagements (construction de barrages et de retenues). L'interprétation des profils de Plomb et de PCB est plus complexe, eu égard à la complexité des mécanismes et des modalités de la sédimentation fluviatile ; bien que nous ayons choisi des sites caractérisés par une décantation fine, les séquences sédimentaires étudiées enregistrent aussi les événements de type "crue". Les polluants dosés ayant une forte affinité particulaire, il convient donc de prendre en compte le lien étroit entre dynamique sédimentaire et concentration en métaux (Pb) et composés organiques (PCB). Néanmoins, Les sédiments du Rhône sont marqués par une baisse significative de la teneur en Plomb, les valeurs actuelles rejoignant progressivement le bruit de fond géochimique. Quant aux PCB, les tendances sont plus complexes car la contamination est souvent diffuse ; les différences entre les sites amont et les sites aval sont significatives et confirment la difficulté de relier les sources chimiques et les sources géographiques. Les modèles sur lesquels nous travaillons actuellement permettront de comprendre et de préciser l'origine des PCB identifiés dans les séquences historiques des sédiments du Rhône.