Il existe des idées reçues au sujet des fleuves, comme la pollution de la Seine, la puissance du Rhône et le déficit structurel de la Garonne qui nous incitent à trouver naturels certains modes de gestion qui résultent en réalité de choix politiques. Ces représentations sont d’autant plus tenaces qu’elles sont régulièrement réactualisées dans les discours, y compris dans la construction des connaissances sur ces fleuves. La sociologie des sciences et la political ecology sont des approches complémentaires pour questionner ces évidences qui inscrivent certains usages de l’eau dans la nature au point d’en faire des lieux communs, influençant les modélisations des chercheurs et les recommandations faites au nom de la science. Cet article illustre l’intérêt de combiner ces deux approches à partir de trois projets de recherche contemporains ayant produit des connaissances et des modes de gestion contrastés sur trois grands fleuves français. Nous commençons par préciser comment la political ecology tient compte de la géographie et de l’économie politique des ressources naturelles dans son approche et en quoi cela complète utilement la sociologie des sciences de l’environnement. Puis nous combinons ces deux approches pour comprendre successivement la diversité des savoirs produits sur les riverains de la Seine, du Rhône et de la Garonne entre 1980 et 2000 et leurs effets sur la décision.