Le suivi des contaminations de l’environnement aquatique par des micropolluants organiques tels que les pesticides est un enjeu majeur dans les politiques de préservation du bon état chimique et écologique des masses d’eau. L’échantillonnage passif est une technique récemment développée qui représente d’ores et déjà une alternative simple et économique aux échantillonnages ponctuel et moyennés automatisés pour la détermination d’estimations réalistes de la contamination des eaux de surface par des micropolluants organiques. Cette technique permet de déterminer des concentrations moyennes des composés ciblés intégrées sur la période d’exposition, allant de quelques jours à quelques semaines selon l’échantillonneur passif. De plus, l’accumulation passive des contaminants dans la phase réceptrice de cet outil permet l’abaissement des limites de quantification. Cependant, avant l’application de cette technique sur le terrain, un étalonnage doit être réalisé en conditions contrôlées de laboratoire. En d’autres termes, la cinétique d’accumulation des contaminants d’intérêt dans l’échantillonneur doit être étudiée dans le but de déterminer les taux d’échantillonnage correspondants, nécessaires au calcul des concentrations moyennes. Plusieurs outils ont été développés au cours de ces deux dernières décennies pour l’échantillonnage passif de micropolluants organiques aux propriétés physico-chimiques variées. Les composés hydrophobes tels que les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et les polychlorobiphényles (PCB) sont généralement échantillonnés par le dispositif SemiPermeable Membrane Device (SPMD) [1], tandis que le Polar Organic Chemical Integrative Sampler (POCIS) a montré de bons résultats vis-à-vis des micropolluants organiques polaires tels que les produits pharmaceutiques et les pesticides hydrophiles [2, 3]. Néanmoins, l’échantillonnage passif de pesticides hydrophobes a pour l’instant fait l’objet de peu d’études. L’extraction sur barreau (Stir Bar Sorptive Extraction - SBSE) est une technique d’extraction sans solvant de composés organiques [4]. L’extraction d’un échantillon d’eau est réalisée grâce à un barreau constitué d’un aimant enfermé dans une tige en verre recouverte d’un film de polydiméthylsiloxane. Les composés extraits sont ensuite désorbés de façon thermique ou chimique, avant leur analyse par chromatographie gazeuse ou liquide. Cette technique est utilisée au laboratoire dans les domaines alimentaire, environnemental, pharmaceutique et biomédical pour l’analyse d’une large gamme de composés organiques, allant des perturbateurs endocriniens tels que les hormones estrogéniques aux HAP et PCB ; et a récemment été appliquée sur site pour l’analyse de HAP dans des eaux marines [5]. L’objectif de cette étude est de développer et valider l’application in situ de la SBSE en tant que technique d’échantillonnage passif (nommée passive SBSE) pour le suivi de 16 pesticides dans les eaux surface. Tout d’abord, les performances de la SBSE, suivie d’une désorption chimique et d’une analyse par HPLC-MSMS, vis-à-vis de l’extraction des pesticides étudiés contenus dans des échantillons d’eau brute reconstituée et d’eau filtrée ont été comparées en laboratoire, dans le but d’identifier la fraction de contaminants réellement échantillonnée par cette technique. Ensuite, l’étalonnage des barreaux SBSE a été réalisé en laboratoire pendant 7 jours et en conditions dynamiques contrôlées afin de déterminer les taux d’échantillonnage des pesticides d’intérêt. Les données cinétiques obtenues de l’étalonnage ont permis d’évaluer les limites de quantification atteintes par cette technique. Enfin, des barreaux SBSE ont été déployés dans une rivière d’un bassin versant agricole, situé dans le Beaujolais, pendant plusieurs périodes d’une à deux semaines, lors de deux campagnes d’étude réalisées en 2010 et en 2011. Les concentrations moyennes des contaminants étudiés ont été déterminées par calcul à l’aide des taux d’échantillonnage, et ont été comparées à celles obtenues par échantillonnage ponctuel et moyenné automatisé. La passive SBSE a permis l’intégration d’un pic de pollution provoqué par une crue de la rivière à la suite d’un événement pluvieux et a montré une meilleure représentativité temporelle des concentrations des pesticides ciblés que l’échantillonnage ponctuel. Cette technique a également permis de quantifier avec une précision satisfaisante plus de composés hydrophobes et à des niveaux plus bas que les techniques d’échantillonnage actives classiques.