Durant la décennie 2002-2010, face à de nouvelles donnes économiques et réglementaires, la filière viticole est en tension entre souci de conservation de son patrimoine foncier et enjeux de production. Alors que des acteurs de la filière mettent en avant l’ancrage territorial et l’identité de la production, d’autres ont été amenés à arracher ou à restructurer leurs vignes. Dans ce contexte, nous nous demandons dans quelle mesure les dimensions patrimoniales de la production viticole bordelaise déterminent une différenciation des vignes par les producteurs, en particulier sur le marché du foncier. Dans le cadre d’une analyse hédonique (Lancaster 1966 ; Rosen 1974) et en définissant le patrimoine comme un ensemble d’éléments hérités permettant la reproduction dans le temps et dans l’espace d'une certaine façon de produire (Barrère et al. 2005), nous posons la question suivante : une lecture patrimoniale de la filière viticole bordelaise peut-elle expliquer la structuration spatiale du gradient de prix du foncier et donc le rapport de la filière bordelaise à ses "lieux" de production ? Pour ce travail, nous disposons d’observations de prix terrains viticoles non bâtis, cédés entre 2002 et 2010 en Gironde, et qui resteront en production après le transfert des droits de propriété (Safer Aquitaine-Atlantique). L'utilisation de l’outil hédonique dépend de notre capacité en amont à identifier et localiser les ressources patrimoniales de la filière viticole puis à traduire en variables opérationnelles le lien testé avec le foncier agricole. Les variables explicatives testées sont déduites d’un matériel qualitatif rassemblant monographies historiques, contenus médiatiques et livrables promotionnels. L’analyse économétrique aboutit à un modèle spatial permettant de prendre en compte les effets de seuil dans la structuration du gradient du prix du foncier viticole. Nous obtenons ainsi un premier modèle simple et global de compréhension de la structuration patrimoniale du vignoble bordelais.