Le monde agricole, et particulièrement la viticulture, a connu des bouleversements importants en terme de pratiques depuis le milieu des années 70. Le travail laborieux de la terre a été remplacé par le recours à des machines de plus en plus performantes et l’utilisation facilitée de nombreux produits chimiques. Leur utilisation généralisée a cependant rapidement engendré des effets sur les milieux aussi bien en termes d’organisation spatiale que de qualité et de fonctionnement. Dès le milieu des années 80, se sont créés des groupes de viticulteurs pour mettre en avant la lutte raisonnée. De façon plus générale, l’action combinée de la réglementation, des formations et des actions des viticulteurs a été à l’origine d’une évolution importante des pratiques phytosanitaires au fil du temps. Parallèlement, depuis la fin des années 80, les chercheurs d’Irstea ont mené de nombreuses études sur les rivières du Site Atelier Ardières Morcille. Au début, les recherches ont concerné principalement l’analyse chimique de la qualité de l’eau, en appliquant des techniques de plus en plus performantes pour rechercher un nombre croissant de substances à des concentrations de plus en plus faibles. Elles ont également visé l’amélioration des stratégies d’échantillonnage d’eau dans les rivières pour permettre notamment de mieux comprendre les dynamiques spatiales et temporelles des substances chimiques lors d’événements hydrologiques particuliers comme les crues. Pour comprendre l’impact que peuvent avoir les substances chimiques détectées, des analyses biologiques sont venues compléter et enrichir les analyses chimiques, à partir des années 2000. L’utilisation de plusieurs modèles biologiques : crevettes d’eau douce (Gammarus sp.) et communautés microbiennes algales, a permis d’identifier les impacts spécifiques d’insecticides et d’herbicides mais aussi de rendre compte de la récupération des écosystèmes après l’arrêt d’utilisation de certains produits phytosanitaires, comme le diuron par exemple. L’ensemble des travaux réalisés sur le site s’appuie depuis ses origines sur des allers-retours permanents entre le laboratoire, lieu privilégié de mises au point en conditions contrôlées, et le terrain, pour des applications en conditions réelles, adaptées au contexte local. Tout au long des recherches menées sur ce site, la forte implication et la collaboration des acteurs locaux a permis aux chercheurs d’approfondir leurs connaissances des caractéristiques et des contraintes spécifiques du site Ardières Morcille et ainsi de travailler au développement de méthodes et d’outils plus pertinents pour une meilleure gestion de la qualité des cours d’eau. Les évolutions importantes des pratiques viticoles qui se dessinent face à la réduction des herbicides autorisés, au changement climatique, au développement de l’agro-écologie, …etc., devront être intégrées dans la réflexion des chercheurs pour identifier les nouveaux besoins de recherche.