Les recherches consacrées à la mise en oeuvre des prescriptions européennes en matière d'environnement insistent surtout sur la dimension socio-politique des processus : relations entre acteurs, institutions, boîtes à outils… Cette communication met en lumière la dimension géographique de ces processus : la mise en oeuvre de politiques environnementales (notamment) passe par le repérage dans l'environnement et l'institution dans le champ social de « motifs environnementaux » (Bouleau, 2017). A partir de l'analyse d'entretiens et de documents relatifs au bassin d'Arcachon, elle montre l'importance de deux « prises » - les oiseaux d'eau et les herbiers de zostères - dont les trajectoires sont différentes et peuvent se croiser ou diverger selon les situations (acteurs en présence, politiques concernées, états écologiques et processus biophysiques…). Les oiseaux d'eau offrent une prise locale qui ressert à chaque injonction politique, sous des variantes dont la dimension géographique est retravaillée pour servir de multiples desseins ; elle finit par porter le poids de nombreux conflits. Les herbiers de zostères forment une prise passant d'un cercle d'initiés (usagers locaux de l'estran lanceurs d'alerte) à un autre (scientifiques et experts) en se vidant apparemment de sa dimension politique. Paradoxalement, l'Europe en tant qu'institution demeure peu visible au sein de ces processus, et pourtant elle se construit aussi lorsque les acteurs travaillent à donner une épaisseur géographique à ses instruments politiques, aux échelons locaux de gouvernance.