Ingénierie agroécologique, intensification écologique et innovation agricole : le défi des systèmes « multi-espèces »
Résumé
L’agroécologie dont les concepts et les premières applications commencent à s’affirmer durant les décennies 1980 et 1990 (Altiéri, 1999 ; Tilman et al, 2002), s’affiche progressivement à l’échelle mondiale comme un nouveau standard, en rupture avec les principes de l’agriculture conventionnelle intensive, accusée de désordres écologiques et de menaces sur la santé humaine devenus aujourd’hui insupportables. Introduite par Odum en 1962, la notion d’ingénierie écologique désigne une stratégie se définissant comme « une manipulation douce de l’environnement consistant à utiliser de faibles quantités d’énergie pour piloter des systèmes productifs qui utilisent essentiellement des sources d’énergie naturelles ». Ce concept de base est aujourd’hui relayé par ceux d’ingéniérie agroécologique et d’intensification écologique qui recourent aux démarches de l’agronomie –science tournée vers l’action- pour piloter le fonctionnement d’agrosystèmes en s’inspirant des processus écologiques qui règlent le fonctionnement des écosystèmes naturels. L’objectif de cette présentation est de revenir sur les traits fondamentaux de ces concepts en mettant en exergue leurs potentialités et limites, face aux enjeux alimentaires, énergétiques et écosystémiques qui sont dédiés à l’agriculture. Le défi de la réintroduction de la biodiversité dans les cultures sera examiné sous l’angle original des systèmes multi-espèces (Malézieux et al, 2008). Nous ferons ressortir i) d’un point de vue scientifique, les différentes facettes, niveaux d’échelles et concepts d’approche sous-tendus par la mise en œuvre du renforcement de la diversité dans les systèmes de culture et son évaluation, mais aussi ii) les remises en cause technologiques et sociales incontournables pour co-construire l’innovation nécessaire à l’émergence d’une éco-agriculture durable (Godard & Hubert, 2005).