Avec pour objectif commun d'explorer de nouveaux systèmes en rupture avec les vergers actuels fortement dépendants des intrants phytosanitaires, un groupe Vergers durables associant acteurs professionnels et scientifiques de plusieurs pays (France, Espagne, Belgique et Suisse) s'est créé en 2008. Le groupe ‘embarque’ de plus avec lui un réseau de vergers et d’expérimentation : parcelles de producteurs, expérimentations systèmes… Sur la base de présentations, d'ateliers et de visites de vergers, organisé sur 2 jours une fois par an, ce groupe partage, discute et finalement développe les connaissances acquises dans une diversité de méthodologies pour la conception et d'évaluation de systèmes « durables ». La complémentarité de ces approches permet ainsi au groupe de traiter simultanément des propriétés attendues des nouveaux vergers à concevoir, des leviers à mobiliser pour y arriver, des contraintes pour leur mises en œuvre et des performances que l'on peut espérer atteindre (Penvern et al., 2012). Parmi ces différentes méthodologies, des approches expérimentales sont mobilisées en vue de tester différentes solutions techniques ou systémiques pour plus de durabilité. Ainsi le verger de pommier expérimental "zero pesticides" du FIBL établi en 2006 apporte des réponses quant aux leviers mobilisables pour augmenter les bénéfices d'une biodiversité fonctionnelle en distinguant ce qui relève de leviers structuraux (ou "conservateur" : matériel végétal, distance de plantation, ...) de leviers annuels (ou "dynamiques" : protection des plantes). Si ces résultats sont localisés et spécifiques au système expérimenté, l'évaluation dans un environnement connu permet de définir les performances et les limites de ces solutions. En retour, l'expertise plurielle mobilisée dans le groupe Vergers Durables, permet de discuter de leur pertinence dans une gamme étendue de conditions et de critères d'appréciation (l'innovation n'étant pas considérée de la même manière par un producteur et un chercheur); pertinence jugée de manière participative à l'aune des objectifs et systèmes de productions spécifiques à chaque situation et sous contraintes du terrain. En parallèle, la méthodologie participative du groupe Vergers Durables permet de définir une vision commune, aussi générique que le groupe est représentatif, de ce qu'est un verger durable sur la base de propriétés attendues, et d'identifier, dans le champ des connaissances et des pratiques, des leviers et vergers candidats (Penvern et Simon, 2014). Si l'évaluation de ces leviers et vergers n'est ici possible qu'à dire d'experts et a priori, elle apporte des éléments de réponse sur les contraintes socio-techniques pour leur mise en œuvre, permettant in fine une sélection de solutions pour la reconception de vergers plus durables. En retour, les expérimentations systèmes, qu'elles se fassent en stations ou dans des vergers commerciaux, se sont inspirés de ces solutions pour la conception de leurs nouveaux vergers, et permettent ainsi leur mise à l'épreuve in situ. Cette complémentarité entre méthodologies expérimentale et participative est utilisée dans une démarche itérative de conception-évaluation permettant d'explorer un gradient de solutions plus ou moins en rupture avec les vergers actuels de manière à satisfaire des trajectoires multiples de reconception de vergers. Les connaissances produites au sein des expérimentations systèmes sont ainsi appréciées (évaluées et sélectionnées) par le groupe avant d'ensemencer de nouvelles initiatives portées par les membres du groupe où elles seront adaptées et situées. Le groupe Vergers Durables a pu initier avec succès un nouveau projet projet Européen du Programme Core Organic + "Eco-Orchard" regroupant 11 partenaires de 9 pays partenaires. Ce projet vise à profiter de cette dynamique de recherche déjà à l’oeuvre pour identifier et tester des méthodes et des solutions qui soient à la fois efficaces et opérationnelles pour apprécier et favoriser la biodiversité fonctionnelle au sein de vergers plus durables.