A social history of vegetarianism
Le végétarisme : esquisse d'histoire sociale
Résumé
La viande, dont la valeur économique et symbolique est importante, est l'objet d'une désaffection dont les formes sont nombreuses et variées. Procédant d'un inventaire critique préalable de la littérature consacrée au végétarisme, cette étude esquisse une histoire sociale du végétarisme comme moyen de l'objectiver. Elle montre que la croisade pour la santé et le refus de la cruauté à l'encontre des animaux, principaux thèmes affichés par les végétariens depuis la fin du 18e siècle comme constitutifs de leur doctrine, sont partie intégrante des catégories d'auto-justification du végétarisme auxquelles les prosélytes ont recours pour propager leur régime. L'étude comparative des exemples de végétarismes à des époques historiques (de la fin du 18e siècle à la période présente) et dans des pays différents (Angleterre, Etats-Unis, France), réalisée à l'aide d'une reconstitution des biographies des prosélytes les plus importants, met en évidence l'extrême diversité qui caractérise le végétarisme. Recrutant le plus souvent ses adhérents parmi les fractions intellectuelles des classes moyennes ou des classes supérieures, le végétarisme devient rarement un phénomène de masse. Ainsi par exemple, si les insatisfactions véhiculées par le discours végétarien (concernant l'élevage industriel, l'alimentation industrielle, la pollution des cours d'eau, de l'air, etc.) sont susceptibles d'être partagées par un large public, elles ne génèrent pas auprès de tous une attitude de défiance à l'égard de la viande.