Disparu en 1987 à l’âge de 68 ans, Denis Bergmann n’aura pas connu la Mission des archives orales de l’Inra, fondée en 1995 par l’une de ses recrues du département d’Économie et de sociologie rurales de l’Inra, Denis Poupardin. Si l’on peut nourrir des regrets pour bien d’autres figures historiques des débuts de l’Inra dont la mémoire n’a pas été captée, il nous est tout simplement apparu impensable de proposer un numéro thématique d’Archorales sur les économistes ruraux de l’Inra sans une évocation convenablement documentée de la trajectoire de Denis Bergmann. Il ne s’agit ni d’en faire un fondateur ni de lui prêter un rôle de maître à penser qui, au reste, ne l’intéressait pas. Plus simplement, nous avons estimé juste d’offrir au lecteur de ce volume thématique retraçant la diversité des parcours des premiers économistes de la recherche agronomique publique une restitution de l’immensité et de la diversité du labeur accompli par Denis Bergmann pour faire vivre en France une recherche en économie ouverte sur le monde international et ses standards scientifiques, à la fois scientifiquement exigeante et politiquement pertinente. Une biographie ne remplace pas l’expression directe d’un témoin. Mais au moins avons-nous cherché à toucher au plus près de l’homme, en lisant son œuvre bien entendu, depuis les notes de travail les plus circonstancielles jusqu’aux publications majeures? mais également en interrogeant les souvenirs de ses collègues et de ses proches, enfin et surtout en ayant accès, grâce à la générosité et à la confiance de sa famille, à sa bibliothèque et à des archives personnelles, documentaires et photographiques, d’un intérêt exceptionnel. À la vérité, on pourrait trouver dans les ressources que nous avons mobilisées suffisamment de matériau pour une thèse d’histoire sur ce que voulait dire pratiquer et programmer la recherche en économie rurale entre les lendemains de la Seconde Guerre mondiale et le milieu des années 1980. Plus modestement, le lecteur trouvera ci-après une restitution de la vie et de l’œuvre de Denis Bergmann, richement documentée, illustrée et soigneusement relue par des témoins directs de sa carrière, en espérant que des chercheurs s’empareront un jour de cette première esquisse pour développer un projet de plus grande ampleur. Que tous les témoins et proches qui nous ont ouvert leurs mémoires et leurs archives trouvent ici l’expression de la profonde reconnaissance du Comité d’histoire Inrae-Cirad et, nous l’espérons, des lecteurs qui découvriront avec intérêt la trajectoire profondément originale de Denis Bergmann.