La compréhension de l’écologie des auxiliaires des vergers est un préalable nécessaire à la conception de systèmes de production sans pesticide toxique, reposant notamment sur la prédation des ravageurs par les auxiliaires. Les araignées, en particulier, sont des prédateurs généralistes dont l’action en tant qu’auxiliaires est encore mal connue. Cette thèse s’intéresse aux déterminants de l’abondance des araignées de la frondaison au sein des vergers, à la prédation des ravageurs des pommiers et de leurs ennemis naturels par ces araignées, et à l’impact de cette prédation sur la régulation des ravageurs. Trois échelles spatiales des processus ont été prises en compte : le pommier, la parcelle et le paysage. De même, l’échelle temporelle a été prise en compte par la phénologie des ravageurs et des araignées. Huit expériences ont été mises en place dans les vergers ou en laboratoire. Diverses méthodes de capture des araignées ont permis de mettre en évidence leur phénologie, d’expliquer l’abondance des araignées selon les pratiques au sein des vergers et les habitats présents dans le paysage, et de mettre en relation leur abondance et la croissance des populations de pucerons. Les techniques d’analyse des contenus stomacaux par PCR, et de tests de prédation ont précisé le régime alimentaire des araignées chasseuses de la frondaison des vergers concernant la consommation du puceron cendré, du carpocapse et de leurs ennemis naturels (syrphes, coccinelles et parasitoïdes). La technique de marquage immunologique a permis de mettre en évidence le déplacement des araignées entre le verger et une de ses haies de bordure. Les résultats de cette thèse concordent pour montrer que les insecticides ont un impact sur certaines espèces d’araignées de la frondaison des vergers, mais que leurs conséquences ne sont pas nécessairement visibles dans le verger selon les indicateurs utilisés. Ceci est dû au fait que certaines espèces d’araignées tolèrent bien les insecticides, et que la recolonisation du verger depuis les habitats environnants, en particulier les habitats semi-naturels, peut être rapide. Toutes les espèces d’araignées chasseuses de la frondaison semblent être de bonnes consommatrices de puceron cendré. L’araignée Philodromus sp (notamment P. aureolus/cespitum), active en hiver, serait particulièrement efficace car elle consomme le puceron cendré dès son éclosion. Néanmoins, au printemps, la quantité de pucerons consommés par les araignées est faible par rapport aux taux de multiplication des individus dans les colonies, ce qui empêche une régulation efficace. La prédation intra-guilde par les araignées chasseuses sur les auxiliaires du puceron semble anecdotique. Les araignées chasseuses de la frondaison consomment les larves de carpocapses dans les pommiers, tandis que l’araignée Cheiracanthium mildei mange également les oeufs de carpocapses. Toutefois, la prédation du carpocapse par les araignées ne permet pas de limiter suffisamment les dégâts causés par ce ravageur dans les vergers non traités. Je recommande de prendre en compte l’action des araignées de la frondaison afin de concevoir des systèmes agro-écologiques qui allient l’action des araignées avec celle des autres auxiliaires et les autres moyens de lutte biologique spécifiques de certains ravageurs.