Analyse fonctionnelle des effecteurs nucléaires du parasitisme des nématodes à galles Meloidogyne incognita et caractérisation de leurs cibles végétales
Résumé
Les nématodes à galles, Meloidogyne ssp., sont des parasites extrêmement polyphages responsables de pertes économiques considérables. Pour infecter leur hôte, ces pathogènes sont capables de manipuler à leur profit des fonctions végétales, afin d’induire la redifférentiation de cellules racinaires en cellules nourricières hypertrophiées et multinucléées, appelées « cellules géantes ». Ces cellules géantes sont indispensables à leur développement. Cette interaction nécessite la sécrétion, via le stylet du nématode, de protéines appelées effecteurs du parasitisme dans les cellules de la plante où ils interagiraient avec des protéines de l’hôte pour réguler leur fonction. L’ontogénèse et le maintien des cellules géantes nécessitent la manipulation des processus nucléaires des cellules hôtes, telles que la régulation transcriptionnelle ou le cycle cellulaire. Des expériences d’immunolocalisation avaient permis de montrer que des effecteurs de nématodes à galles, dont Mi-EFF1 de M. incognita sont sécrétés dans le noyau des cellules géantes, ce qui suppose qu’ils peuvent cibler des fonctions nucléaires pour l’établissement du parasitisme.L’objectif de mes travaux de thèse est de réaliser les analyses fonctionnelles des candidats effecteurs nucléaires de M. incognita et d’identifier et de caractériser leurs cibles végétales. En utilisant une approche couplant analyse in silico et validations fonctionnelles, nous avons identifié 159 effecteurs candidats qui pourraient être sécrétés et cibler le noyau des cellules géantes. Nous avons sélectionné 24 effecteurs candidats afin de réaliser les analyses fonctionnelles. Les expériences d’hybridation in situ réalisées ont permis de montrer que 10 de ces effecteurs sont exprimés dans les glandes œsophagiennes du nématode. L’expression transitoire des effecteurs fusionnés à la GFP par agroinfiltration nous a permis de montrer que six effecteurs nucléaires candidats ont une localisation spécifique dans les noyaux lorsqu’ils sont exprimés in planta. Un système de double hybride en levure a été développé afin d’identifier les cibles végétales de ces candidats effecteurs. En criblant contre une banque d’ADNc de racines de tomate infectées, nous avons identifié différentes cibles chez la tomate qui sont potentiellement impliquées dans les fonctions nucléaires, telles que la voie de signalisation de l’ubiquitine, le cycle cellulaire ou la machinerie de l’épissage. En parallèle, nous avons criblé une banque d’ADNc d’A. thaliana avec Mi-EFF1 comme appât. Nous avons identifié deux protéines qui interagissent avec cet effecteur. Il s’agit d’une glycéraldéhyde-3-phosphate déshydrogénase cytosolique (AtGAPC2) et une protéine de stress universelle (USP). Ces interactions ont été validées in planta par la complémentation bimoléculaire de fluorescence (BiFC). De plus, des tests d’infestation nous ont permis d’observer une réduction significative du nombre de masses d’œufs chez les mutants KO gapc1, ce qui suggère une implication des GAPC dans la réponse de la plante aux nématodes. L’identification et la caractérisation des cibles végétales des effecteurs sécrétés par les nématodes à galles est un défi majeur afin de comprendre le dialogue moléculaire entre la plante et le nématode. Les résultats de ces travaux devraient permettre de mieux comprendre les mécanismes moléculaires contribuant au succès du parasitisme des nématodes à galles, et de développer des nouvelles méthodes de lutte, plus durables et respectueuses de l’environnement et de la santé humaine.