Dans le courant des années 1970, quelques vétérinaires émettent un regard critique sur le modèle productiviste de l’agriculture industrielle. Ils développent alors une médecine vétérinaire préventive, mieux adaptée aux pratiques d'élevage moderne et repensant le rôle des vétérinaires sur l'exploitation agricole : l’écopathologie. Mais, une vingtaine d’année plus tard, celle-ci ne parvient à échapper à ses propres contradictions et disparaît. En effet, les savoirs et les pratiques de l’écopathologie sont réappropriés par les acteurs dominants et perdent leur dimension critique du modèle productiviste. Pour comprendre cet essor contrarié de l’écopathologie, il faut resituer la carrière de cette forme de médecine vétérinaire alternative au coeur des enjeux qui ont concouru à restructurer l'espace des relations entre la médecine vétérinaire et les acteurs de la santé animale pendant la seconde moitié du vingtième siècle. On verra ainsi dans quelle mesure la dimension critique du projet écopathologique doit en réalité être rapportée aux luttes et aux concurrences auxquelles devait faire face la médecine vétérinaire pour préserver son territoire. C'est en définitive la configuration des forces professionnelles et institutionnelles du monde agricole qui permet d'expliquer la portée politique des savoirs et des pratiques écopathologiques.