Alors que l'environnement constituait un non-problème pour l'agriculture, la mise en lumière de pratiques négligentes va mettre en évidence une relation jusqu'alors d'autant plus impensée que le clivage entre agriculture et environnement était inscrit dans les représentations aussi bien que dans les pratiques institutionnelles. Pour que puisse émerger une représentation du paysan comme pollueur, il a fallu un choc déstabilisateur de l'imagerie populaire du monde rural. La dénonciation publique d'affaires telles que la dissémination d'organismes modifiés génétiquement (1987) ou la crise de l'eau (1990) a remis en cause le caractère d'une agriculture conservatrice et gardienne de l'environnement en y substituant l'image iconoclaste de "paysan champion de la pollution verte". Impulsée au niveau de l'agenda politique, la prise en compte de l'environnement dans la politique agricole va-t-elle contribuer à une ségrégation spatiale et sociale plus forte des agriculteurs ou au contraire être le fer de lance d'une politique agricole plus équitable fondée sur le "solidarisme" ? La traduction en français de cet article a été présentée au Colloque "De l'agriculture à l'environnement", à Nantes, les 26-28 février 1992, et a été publiée dans la Revue de Droit Rural No 204, juin-juillet 1992, pp. 255-258.