L’avantage des femmes en matière de santé se traduit dans de nombreux indicateurs tels que l’espérance de vie ou de façon plus générale le niveau de la mortalité à chaque âge. Au-delà d’un facteur biologique, de nombreux travaux sociologiques montrent la plus grande réceptivité des femmes aux messages d’éducation à la santé (Aïach, 2010), en lien avec une socialisation genrée à la santé, notamment liée au statut de mère des femmes. Nous proposons ici d’étudier un moment bien précis de cette construction du rapport genré à la santé à travers l’allaitement, de la mise en place ou non d’un allaitement maternel à la poursuite de ce parcours au fil des naissances. En devenant mère, la femme n’est plus seulement responsable de sa propre santé, mais devient gestionnaire de celle de son enfant et de ceux à venir. À travers une enquête qualitative par entretiens (27 femmes), croisée avec une analyse quantitative des données de l’étude longitudinale française depuis l’enfance (ELFE), nous proposons d’étudier cette socialisation à l’allaitement à travers l’ensemble des instances de socialisation que rencontrent les femmes pendant leur allaitement. Qu’il s’agisse de l’entourage (sa propre mère, son conjoint, ses sœurs, ses amis), du personnel soignant à la maternité, des professionnels médicaux, des diverses sources de conseils indirectes (forums ou sites internet, livres), les femmes construisent une expérience d’allaitement qui leur est propre à travers des résistances, des adaptations ou des soumissions à ces socialisations douces ou fortes, implicites ou explicites auxquelles elles sont confrontées..