Depuis la conférence de Rio (1992), la conservation de la biodiversité a été érigée en norme de gestion de la nature et mise à l’agenda des politiques publiques. L’adoption, la même année, de la directive Habitats (DH) vise à construire un réseau de sites riches en biodiversité à l’échelle de l’Europe, baptisé Natura 2000. A l’issue d’une phase conflictuelle qui a abouti au gel de son application en France, en 1996, le ministère de l’Environnement a choisi d’élaborer par la concertation et la délibération des mesures de gestion sur chaque site. Ce dispositif appelé document d’objectifs (Docob) apparaît comme un exemple de politique procédurale qui suppose la recherche d’accords entre les différents acteurs concernés à l’échelle des territoires. Il est censé favoriser l’appropriation par les acteurs locaux de l’enjeu de conservation de la biodiversité. Dans ce cadre, nous avons choisi de suivre au plus près les interactions entre les différents participants dans le cadre d’espaces de débats que nous avons baptisés “scènes locales ”. La réflexion développée privilégie l’examen d’une politique « en train de se faire » ; elle s’attache à caractériser le statut des scènes locales et à expliciter comment nous les appréhendons d’un point de vue sociologique. Elle montre que l’instabilité et le foisonnement procédural sont des conditions de la mise en oeuvre de cette directive. Elle permet de dégager un certain nombre de traits spécifiques des politiques de la nature. Enfin, elle s’interroge sur la mise en place d’une nouvelle forme d’administration de la nature.