Rodrigues est un territoire insulaire autonome appartenant à la république de Maurice. La filière porcine constitue un des piliers de la fragile économie de l’île. La construction d’un abattoir et d’une unité de découpe annonce un tournant stratégique dans le développement de ce secteur. A l’initiative du réseau QualiREG, nous avons établi un diagnostic global du secteur porcin de Rodrigues en croisant une approche territoriale et une approche filière. L’analyse débouche sur des propositions de développement qui tiennent compte de la mise en route à venir des nouvelles infrastructures. La piste de la labellisation des viandes et produits de charcuterie y est particulièrement développée. La filière locale et le circuit d’export reposent sur deux systèmes d’élevage profondément différents, et qui chacun à leur manière, posent problème : d’un côté l’élevage d’autosubsistance n’est pas en mesure de satisfaire un marché mauricien de plus en plus exigeante en terme de qualité bouchère ; de l’autre un élevage commercial intensif présente des risques environnementaux et n’est pas rentable en raison des handicaps naturels et géographiques de Rodrigues. Dans ce contexte, une alternative serait la mise en place d’une stratégie « terroir » destinée à valoriser le goût « typiquement rodriguais » des viandes et des produits de charcuterie, aussi bien en local qu’à l’export. Il existe un effet « terroir » qui confère un caractère typique aux viandes et aux produits de charcuterie de Rodrigues, et qui est à l’origine d’une certaine réputation. Le goût « typiquement rodriguais » résulte d’une combinaison spécifique de facteurs naturels (race de porc noir, climat, fourrages naturels et végétaux cultivés…) et humains (mode d’élevage) encore mal comprise à ce jour. Les produits de charcuterie traditionnels tirent aussi leur typicité d’un savoir-faire de fabrication unique, qui constitue le reflet de l’origine multiple de la population de l’île Rodrigues. Cette typicité des viandes et des produits de charcuterie, bien qu’en déclin dans un contexte d’intensification des systèmes d’élevage porcin, fait l’objet d’une demande latente. Une stratégie « terroir » suppose une action collective capable d’identifier et de mobiliser les ressources et les compétences nécessaires à la restauration du goût « typiquement rodriguais », et à sa rémunération sur les marchés de niche. La mise en place d’Indications Géographiques pour la viande et certains produits de charcuterie est proposée comme moyen de segmentation du marché, et comme outil de coordination pour une stratégie « terroir ».