Depuis le début des années 90 se produit une évolution importante du contexte concurrentiel des entreprises situées dans une zone de production fruitière, la région de Cuenca del Plata (Province du Nordeste du côté uruguayen et de l'Entre Rios du côté argentin) en raison du rôle croissant de la grande distribution, principal client et débouché pour la production agricole. Pour les unités ayant accès au marché européen, on observe ainsi la montée de contraintes et d'exigences de la part de la grande distribution : pression sur les prix, mise en concurrence, exigences de régularité des qualités et des quantités, imposition de cahiers des charges, évolutions qui globalement les conduisent à un important travail de mise aux normes des procédés et des produits. Si ces contraintes s'imposent de manière identique en Argentine et en Uruguay et devraient tendre à homogénéiser les territoires, les auteurs ont observé la permanence de sous-systèmes différenciés et une résistance à l'effacement des frontières. Or, une frontière ne constitue un avantage stratégique que si elle sépare des situations contrastées et si des réseaux transfrontaliers existent et fonctionnent. Dans le cas de la production des oranges pour l'exportation des deux côtés du fleuve Uruguay, ils ont repéré de tels réseaux d'individus appartenant à différentes organisations et relevant d'institutions ou d'entreprises de différents pays. Il est intéressant de constater que si le fleuve frontière n'est pratiquement pas franchi par les fruits, ni par les ouvriers agricoles, les dirigeants et les spécialistes eux par contre ne cessent de traverser le fleuve pour acquérir les informations dont ils ont besoin pour améliorer leur capacité à produire. Les échanges d'informations ainsi effectués favorisent le développement du secteur ou de la branche d'activité dans lesquels ces acteurs sont inscrits, en contribuant, de la sorte, au développement de la région.