Le territoire et sa composante "terroir" peuvent intervenir dans la différenciation des marchés du vin à la production. Une grille d'analyse des transactions à la production est proposée en prenant en compte d'une part les relations possibles entre produits et territoires, et d'autre part l'articulation entre le temps de la transaction au niveau micro-économique et celui de la transformation de son cadre réglementaire au niveau sectoriel. La notion de terroir est alors une des composantes du territoire. Elle peut être mobilisée pour qualifier et différencier le produit au même titre que les composantes administrative, socio-économique, ou patrimoniales de ce territoire. Elle prend une valeur économique à partir du moment ou sa reconnaissance peut être construite, légitimée, même si un "voile d'ignorance" persiste sur son rôle objectif dans la différenciation physico-chimique du produit. La seconde partie est une illustration des éléments de la réflexion théorique précédente en retenant non pas le secteur des vins AOC mais celui des vins de table et de pays pour lesquels la qualification territoriale est beaucoup plus nouvelle. Une recherche, menée conjointement par l'ONIVINS et l'INRA Economie de Montpellier, a porté sur l'analyse statistique des déterminants du prix des vins de table et des vins de pays à la production. Traitant l'ensemble des transactions en vrac du marché français, l'analyse fournit une image de la différenciation qualitative des produits, mesurée par la dispersion du prix à la production. Dans l'ensemble des éléments expliquant cette dispersion, les variables exprimant la dimension territoriale de l'offre ont une place importante, mais elles sont en concurrence avec le cépage, qualification qui évacue le territoire. Les enquêtes directes effectuées en Languedoc-Roussillon auprès de plusieurs acteurs de la filière permettent de préciser la position relative du territoire et du terroir dans la construction sociale de la qualité de ces produits.