Le premier objectif de ce texte est de rendre compte des décalages temporels de croissance des industries alimentaires en France. Ces décalages de croissance s'expliquent assez bien si on les rapporte à trois composantes : les modifications de structure de la ration alimentaire (qui retentissent sur la séquence de développement : industrie des céréales, industries des matières grasses, du sucre, des boissons, industries du lait et de la viande) ; les changements des procédés de production (leur mécanisation s'accompagnant d'une baisse de l'intensité capitalistique du fait du changement dans la composition globale des industries alimentaires) ; les caractéristiques du marché (part variable, selon les produits, de l'autoconsommation et des achats). Second objectif de ce travail : prendre les industries alimentaires comme terrain d'étude pour analyser des aspects plus généraux de l'économie industrielle, notamment l'évolution des tailles et des distributions de taille des établissements. Sont confirmées plusieurs stabilités précédemment relevées dans la littérature économique mais à un niveau moins détaillé de la nomenclature et/ou sur une période moins longue que celle examinée ici : stabilité relative de l'emploi par sexe, stabilité relative de la distribution des établissements selon leur taille. Cependant, cette inertie relative des caractéristiques technico-économiques des industries doit elle-même être interrogée : ne résulte-t-elle pas, pour partie au moins, d'artefacts dans la constitution des industries comme rassemblement d'unités "identiques" ? S'il n'y a pas d'artefacts, comment rendre compte de la coexistence durable d'établissements concurrents et de tailles très dissemblables dans le même secteur d'activité ?