Cartographie de territoires forestiers à partir de données LiDAR ou photogrammétriques - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2020

Cartographie de territoires forestiers à partir de données LiDAR ou photogrammétriques

Résumé

Objectif de la communication : Les forêts, notamment en zone de montagne, fournissent de multiples services : production de bois, espace de loisirs, réservoir de biodiversité, protection contre les aléas naturels... (Ancelin et al. 2006). L’objectif de la gestion durable des forêts est de maintenir ces services dans le temps et dans l’espace, dans un contexte incertain lié aux changements globaux. Afin de préparer une politique forestière adaptée à un territoire et pour optimiser sa mise en oeuvre opérationnelle, il est nécessaire de connaitre la quantité, les caractéristiques et la répartition de la ressource forestière sur le territoire. Les photographies aériennes ont été pendant longtemps les seules sources permettant de cartographier des territoires. Les avancées récentes de la photogrammétrie par corrélation d’images permettent aujourd’hui d’associer sur chaque pixel des informations spectrales et géographiques à haute résolution (Deseilligny, 2007). Les applications pour la gestion forestière sont nombreuses (Goodbody et al., 2019). Depuis une trentaine d’années, le laser aéroporté (LiDAR) a par ailleurs révolutionné la télédétection, en particulier en foresterie (Maltamo et al., 2014), grâce à la capacité du signal laser à pénétrer la végétation forestière jusqu’au sol. Il est alors possible de caractériser très finement à la fois la microtopographie du sol et la structure de la végétation. Quelle que soit la source de donnée de télédétection, la cartographie de grandes surfaces forestières implique de relever le défi de la quantité d’information à traiter. Il s’agit « d’industrialiser » une technologie éprouvée sur des sites de recherche (Munoz et al., 2015) vers une application opérationnelle ; c’est-à-dire au plus près des territoires forestiers et des services gestionnaires. C’est l’objectif qui a été poursuivi par les partenaires du projet OUIGEF en testant des méthodes et en développant des outils pour caractériser, cartographier et assurer le suivi de la ressource forestière à partir de données de télédétection aéroportée. Méthode : La chaine de traitement mise au point par la RDI-ONF pour modéliser et cartographier la ressource forestière a été appliquée sur des nuages de points 3D issus de deux sources de données : acquisition LiDAR aéroporté et traitement photogrammétrique d’images aériennes. La modélisation requiert des données de terrain pour la calibration : un réseau de placettes mesurées sur le terrain. Elle est réalisée soit par la méthode dite surfacique (White et al., 2013), qui consiste à établir des relations statistiques entre les caractéristiques des nuages de points et les grandeurs forestières d’intérêt, soit par la méthode de détection d’arbre (Saint-Onge et al., 2015), qui passe par une identification préalable des positions et caractéristiques des arbres. La zone d’étude principale est la forêt domaniale de Grande Chartreuse, en Isère. Les 12 000 ha de la forêt ont été survolés par un capteur LiDAR à l’automne 2016, avec une densité moyenne d’émission de 20 pts/m². Une acquisition de photos aériennes a été réalisée en même temps que l’acquisition LiDAR. Le calcul du nuage de point 3D a été réalisé par la société Sintégra. Un deuxième nuage de points photogrammétriques a été calculé à partir d’images aériennes de l’IGN. Les données de calibration sont constituées de 340 placettes de terrain mesurées durant l’été 2015. Sur ces placettes, les mesures ont consisté à identifier l’essence et mesurer le diamètre à 1,3 m et la position de tous les arbres de plus de 17,5 cm de diamètre sur un rayon de 15 m. Les grandeurs forestières suivantes sont ensuite calculées pour chaque placette. - Le diamètre quadratique moyen : lié à la taille des arbres, il renseigne sur la maturité du peuplement pour la récolte. - La surface terrière : somme des surfaces des sections des troncs s’ils étaient coupés à 1,3 m de haut, elle renseigne le forestier sur la quantité de bois présent sur une surface. L’évaluation de la chaîne de traitement se fait à deux niveaux. Au niveau de l’arbre, les arbres détectés sont mis en correspondance avec les arbres inventoriés et les caractéristiques (diamètre, essence) prédites et relevés sont comparées. Au niveau de la placette, les grandeurs forestières prédites sont comparées à celles calculées à partir des mesures de terrain. Le passage à l’échelle a été testé en appliquant la méthodologie à un second jeu de données de 166 placettes, couvert par une acquisition LiDAR effectuée par l’IGN en Savoie. Résultats : Au niveau de l’arbre, l’algorithme permet de détecter entre 56 et 68 % des arbres mesurés sur le terrain (taux de détection). On cherche par ailleurs à limiter le taux de commission, lié aux fausses détections (détections ne correspondant à aucun arbre sur le terrain). Le meilleur compromis entre taux de détection élevé et taux de commission faible est obtenu avec les données LiDAR. Avec les données photogrammétriques issues de l’IGN le taux de commission est plus faible (11 %), mais la détection est moins bonne (56 %). Avec les données photogrammétriques acquises simultanément au LiDAR, le taux de détection est très élevé, mais avec 36 %, le taux de commission est rédhibitoire. Sur la seconde zone d’étude LiDAR, le taux de commission est le plus faible : 9%. En Chartreuse, quelle que soit la source de donnée utilisée, l’erreur quadratique moyenne de prédiction du diamètre est autour de 9 cm, soit 22 à 25 % d’erreur en moyenne. Feuillus et résineux sont distingués correctement dans 70 à 80 % des cas. Lorsque l’on cherche à distinguer en plus, le sapin de l’épicéa, le taux de bonne classification est un peu plus faible, autour de 60 à 70 %. C’est avec le LiDAR que la distinction est la meilleure. L’application à grande échelle de cette méthode de distinction des résineux et des feuillus est très satisfaisante, puisque le taux de bonne classification est de 82 % sur la seconde zone LiDAR. Au niveau de la placette, le diamètre quadratique moyen est prédit avec 15 à 18 % d’erreur et la surface terrière avec 29 à 33 % d’erreur, pour les placettes de Chartreuse. On peut noter que les dispersions des erreurs de prédiction de surface terrière obtenues sont assez cohérentes, quoique un peu fortes, lorsque la détection de tige est réalisée à partir des données photogrammétriques. L’application de la méthode sur la seconde zone LiDAR montre des résultats encore meilleurs malgré une densité de points LiDAR plus faible. Retombées : Les résultats obtenus lors de cette étude montrent tout d’abord que la chaîne de traitement mise en place pour cartographier les variables forestières à partir de nuages de points et de relevés de terrain est opérationnelle. Les différentes étapes nécessaires à sa mise en oeuvre ont été formalisées et des outils ont été produits pour pouvoir les réaliser tout en étant capable de gérer des quantités de données correspondant à un territoire de la taille d’un parc naturel régional. La donnée LiDAR reste la plus performante pour l’extraction des informations forestières, comme le montrent les comparaisons réalisées sur le site de la Chartreuse. Les niveaux de précision atteints pour les variables forestières sont comparables avec ceux que l’on peut attendre d’autres méthodes d’inventaire (Monnet and Munoz, 2015), et ont l’avantage de permettre une cartographie exhaustive d’un massif forestier. Les précisions obtenues avec les nuages 3D issus de données photogrammétriques sont très proches de celles du LiDAR, ce qui démontre leur fort potentiel pour mettre à jour les caractéristiques de la forêt dans les zones où une acquisition LiDAR aurait déjà été effectuée. En effet, leur exploitation dépend encore de la disponibilité d’un modèle numérique de terrain d’une précision que seules les acquisitions LiDAR peuvent à ce jour garantir en zone de montagne. L’actualisation pourra ensuite se faire à un coût inférieur à une campagne LiDAR, soit via des vols dédiés réalisés par un prestataire, soit idéalement en valorisant les acquisitions réalisées en routine par l’IGN. La photogrammétrie comporte en outre une information spectrale plus fournie que le LiDAR, qui n’a pas encore été valorisée dans cette analyse. On peut notamment attendre de l’utilisation de la bande infra-rouge une amélioration des résultats de distinction feuillus-résineux. La capacité à cartographier les caractéristiques de la forêt et les services qu’elle fournit sur l’ensemble d’un territoire offre d’importantes perspectives en termes d’inventaire forestier, d’élaboration de politiques forestières et de mise en œuvre opérationnelle. Cependant, l’existence de cette information pour chaque parcelle et sa possible diffusion suscite des inquiétudes, notamment chez les propriétaires privés. L’enjeu est de s’assurer qu’elle sera utilisée aux bénéfices des propriétaires, en évitant d’aggraver la fracture numérique, et en s’inscrivant dans les politiques de gestion multifonctionnelle et durable soutenues par les collectivités locales ou services de l’État. Bibliographie : Ancelin, P., Barthelon, C., Berger, F., Cardew, M., Chauvin, C., Courbaud, B., Descroix, L., Dorren, L., Fay, J., Gaudry, P., Gauquelin, X., J, G., Joud, D., Loho, P., Mermin, E., Plancheron, F., Prochasson, A., Rey, F., Rubeaud, D., Wlérick, L., Joud, D., Gaudry, P., Gauquelin, X., Courbaud, B., 2006. Guide des sylvicultures de montagne Alpes du Nord Françaises. Deseilligny, M.P., 2007. MicMac, un logiciel pour la mise en correspondance automatique d’images dans le contexte géographique. Goodbody, T.R.H., Coops, N.C., White, J.C., 2019. Digital Aerial Photogrammetry for Updating Area-Based Forest Inventories: A Review of Opportunities, Challenges, and Future Directions. Curr Forestry Rep 5, 55–75. https://doi.org/10.1007/s40725-019-00087-2 Maltamo, M., Naesset, E., Vauhkonen, J., 2014. Forestry applications of airborne laser scanning. Concepts and case strudies., Springer. ed, Managing Forest Ecosystems. Monnet, J.-M., Munoz, A., 2015. Comparaison de méthodes de spatialisation pour l’agrégation par parcelle des estimations de paramètres forestiers par LiDAR aéroporté. Revue Française de Photogrammétrie et Télédétection 211–212, 93–102. Munoz, A., Bock, J., Monnet, J.-M., Renaud, J.P., Jolly, A., Riond, C., 2015. Évaluation par Validation Indépendante des Prédictions des Paramètres Forestiers Réalisées à Partir de Données LiDAR Aéroporté. Revue Française de Photogrammétrie et Télédétection 81–92. St-Onge, B., Audet, F.-A., Bégin, J., 2015. Characterizing the Height Structure and Composition of a Boreal Forest Using an Individual Tree Crown Approach Applied to Photogrammetric Point Clouds. Forests 6, 3899–3922. https://doi.org/10.3390/f6113899 White, J.C., Wulder, M.A., Varhola, A., Vastaranta, M., Coops, N.C., Cook, B.D., Pitt, D.G., Woods, M., 2013. A best practices guide for generating forest inventory attributes from airborne laser scanning data using an area-based approach.
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Psdr4-Symposium_E4_Monnet_teledetection_150dpi.pdf (2.48 Mo) Télécharger le fichier
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-02989390 , version 1 (05-11-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02989390 , version 1

Citer

Jean-Matthieu Monnet, Jérôme Bock, Alain Munoz, Étienne Teissèdre, Marie Barbier. Cartographie de territoires forestiers à partir de données LiDAR ou photogrammétriques. Symposium PSDR4 - Transitions pour le développement des territoires - Connaissances et pratiques innovantes pour des modèles agricoles, alimentaires et forestiers résilients, Oct 2020, Angers, France. ⟨hal-02989390⟩
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