Les politiques publiques actuelles de gestion du risque inondation en France sont le résultat d’un changement de paradigme récent qui vise, dans une approche plus globale, à restaurer les champs d’expansion des crues, réglementer l’entretien et l’aménagement des cours d’eau et répartir le risque inondation sur l’ensemble du bassin versant. Les espaces agricoles se trouvent ainsi souvent exposés artificiellement à une sur-inondation, en tant que champs d’expansion des crues, dans le but de protéger les zones urbaines et aval. On compte alors sur leur capacité à rester en place durablement et à retrouver un fonctionnement normal après le passage des inondations. Or, ces dernières ont des impacts non négligeables qui sont encore assez mal connus. C’est la raison qui a amené les chercheurs de l’équipe G-eau Inondation de l’INRAE à œuvrer pour mieux connaître ces impacts. Des retours d’expériences post-inondation menés à court, moyen et long termes ont mis en avant qu’il s’agit de phénomènes complexes. Les chercheurs ont alors construit depuis 2019 une nouvelle démarche d’observation, appelée Réseau d’Observateurs des Impacts des inondations. Il s’agit d’un projet de sciences participatives, qui vise à nouer des partenariats entre agriculteurs et chercheurs pour suivre annuellement l’évolution d’exploitations agricoles sur un temps long (15 ans) en rapport aux événements d’inondation. Ce projet a vu le jour dans le cadre d’un observatoire, le système d’observation des impacts des inondations, dont le territoire d’étude est centré autour de Montpellier et de ses espaces périurbains. La première étape de développement de ce réseau a consisté en une enquête auprès d’agriculteurs touchés, afin de comprendre leur situation face à ce risque naturel et leur intérêt potentiel pour le projet. Elle a permis de rassembler plusieurs candidats au réseau. D'autre part, le recueil des attentes des chercheurs et des agriculteurs envers ce réseau a permis la formulation de recommandations afin que ce projet de sciences participatives puisse atteindre ses objectifs à la fois scientifiques et humains, définis par les chercheurs à son commencement. Ces recommandations appellent à une vigilance par rapport à certains biais liés au territoire ou aux contacts à disposition, qui poussent par exemple à rencontrer des exploitations pratiquant les productions majoritaires, en contradiction avec une démarche de variété dans l’échantillon visé. On recommande également de définir dès le départ des clauses limpides de collaboration et d’entendre les attentes, demandes et besoins de chacun quant au déroulement du projet. Dans un second temps, l’enquête a soulevé de nombreuses problématiques territoriales liées à la thématique inondation. Ce rapport propose des préconisations aux acteurs locaux afin de fluidifier les interactions entre eux et permettre la réussite des projets de prévention et gestion du risque inondation dans de meilleures conditions. Les thèmes émergeant des entretiens concernent notamment l’entretien et aménagement des cours d’eau, l’imperméabilisation grandissante des sols, les systèmes d’indemnisation agricole, le principe de solidarité amont-aval, la délimitation et réglementation des zones inondables et la pratique de la concertation dans les projets de prévention des inondations. En point commun à tous ces sujets, il semble qu’il y ait un travail important à faire au sujet de la communication entre les acteurs concernés par les inondations. Cela passerait par la restauration d’une compréhension mutuelle, pour briser le bras de fer qui s’installe parfois notamment entre profession agricole et acteurs institutionnels, mais aussi une pratique accrue et systématique de la concertation lors des aménagements du territoire.