Histoire et conséquences d’une invasion d’insectes spécialistes des graines de cèdre de l’Atlas au mont Ventoux - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Rendez-vous Techniques de l'ONF Année : 2020

Histoire et conséquences d’une invasion d’insectes spécialistes des graines de cèdre de l’Atlas au mont Ventoux

Résumé

L’intensification du commerce international, des échanges et du transport de matériaux forestiers soumet de plus en plus les arbres ornementaux, les plantations et les écosystèmes forestiers naturels au risque d’invasion d’organismes exotiques, en particulier les insectes. Les invasions d’insectes spécialistes des graines (insectes séminiphages) sont largement favorisées par la quasi-absence de régulation phytosanitaire du commerce des graines dans l’Union Européenne et par certaines des caractéristiques biologiques de ces insectes qui leur permettent de voyager et de survivre en dehors de leur aire d’origine. Le cas des invasions de séminiphages dans les forêts méditerranéennes et en particulier dans les cédraies du mont Ventoux en donne un très bon exemple. Les invasions de ce groupe d’insectes peuvent affecter directement les populations d’arbres par l’émergence de nouvelles interactions arbres-insectes liées à une consommation accrue des graines, qui ont des effets indirects complexes associés à la perte de graines disponibles pour les processus de régénération naturelle. Au cours du XXe siècle, le mont Ventoux a été le théâtre de deux vagues d’invasions impliquant deux espèces d’insectes séminiphages du genre Megastigmus (Hymenoptera : Torymidae) (Fig. 6.1). La première vague concerne M. pinsapinis, introduite probablement avant les années 50 (première identification française en 1952) et dont l’aire native correspond à la distribution du cèdre de l’Atlas en Afrique du Nord. La seconde concerne M. schimitscheki, une espèce inféodée au cèdre du Liban et de Chypre dans son aire native du Moyen-Orient et introduite au début des années 90 dans le secteur du mont Ventoux (première détection en 1994 au Collet de Rolland). La pression parasitaire exercée par M. pinsapinis sur les cèdres du mont Ventoux avant les années 90 était plutôt modérée (5 à 20% des graines consommées). L’introduction et l’expansion démographique de M. schimitscheki a progressivement conduit à des pertes en graines cumulées pouvant atteindre 80 à 90 % (Fig. 6.2), ce qui suggère une intensification de l’impact de ces séminiphages dans les cédraies. En une quinzaine d’années, M. schimitscheki a colonisé la quasi-totalité des cédraies de la région PACA et colonise progressivement celles de l’Occitanie, où M. pinsapinis est déjà une espèce omniprésente. Nous avons cherché à retracer les voies d’invasion de M. schimitscheki au mont Ventoux depuis le Moyen-Orient, à caractériser les facteurs biologiques et écologiques ayant favorisé le succès de cette invasion, à étudier les conséquences écologiques de l’invasion sur les populations de M. pinsapinis déjà présentes, et enfin nous cherchons actuellement à préciser le rôle que pourrait jouer cet accroissement des pertes de fécondité des cèdres sur leur dynamique de régénération naturelle.
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Origine Accord explicite pour ce dépôt

Dates et versions

hal-03727831 , version 1 (31-01-2023)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03727831 , version 1

Citer

Thomas Boivin, Alain Chalon, Violette Doublet, Marion Parizat. Histoire et conséquences d’une invasion d’insectes spécialistes des graines de cèdre de l’Atlas au mont Ventoux. Rendez-vous Techniques de l'ONF, 2020, 63-64, pp.33-36. ⟨hal-03727831⟩
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