« Avec les écolos c’est l’individualisme forcené »
Résumé
La coupe des bois communaux par les habitants constitue une pratique ancienne, transmise depuis le Moyen-Âge dans nombre de communes françaises disposant de forêts. Elle concerne donc avant tout les régions françaises les plus boisées, mais aussi celles où les forêts publiques dominent, tandis que l’exploitation des forêts privées donne lieu soit à l’embauche d’entreprises de bûcheronnage (particulièrement dans le cas de la monoculture sylvicole), soit à un don au profit de voisins proches du propriétaire (dans le cadre de relations clientélaires héritées entre parentèles de châtelains et de villageois). Dans la période contemporaine, les affouages ont connu une recrudescence de pratiquants dans les années 1980-90, suite à la crise énergétique et au vaste mouvement d’accession à la propriété des classes populaires. Il en est ainsi dans la région de Montbéliard où les ouvriers des usines Peugeot rencontrés ont rapidement trouvé cette alternative ou complément au chauffage électrique ou fuel qui équipait leur pavillon. Du fait du renouvellement actuel des formes de « précarité énergétique », de l’importance des affouages dans la zone mais aussi des effets du réchauffement climatique sur la forêt, l’enquête, menée depuis 2019 par entretiens et observations, permet de relever des avis très tranchés sur la question environnementale. Elle montre la reproduction des formes d’inégalité d’accès des différents groupes sociaux aux espaces publics dits « naturels » dans un contexte d'union des univers économiques et politiques autour du statut marchand des forêts, union qui s'affirme s’affirme contre des classes populaires qui tentent de maintenir des usages coutumiers des forêts et défendent sans le clamer un statut écologique des forêts.