Ce rapport d’activité présente les principales actions entreprises en 2021/22 par INRAE EFNO, INRAE BioForA et GBFOR, l'ONF et le CNPF dans le cadre de l'évaluation des variétés issues des vergers à graines de l'Etat. Elles concernent le Douglas, les mélèzes, le cèdre de l’Atlas et les sapins méditerranéens. Douglas La majorité des travaux visent à valoriser le réseau de plantations comparatives installé en étroite collaboration de 2008 à 2016. Constitué d’une quarantaine de dispositifs implantés dans une grande variété de conditions pédoclimatiques, cet outil a pour objectif de caractériser les produits des huit vergers à graines de l’Etat et de fournir des recommandations aux professionnels confrontés au choix des MFR. Performances des variétés Des mesures ont été effectuées dans 7 dispositifs à 12 ans. Leur analyse en 2022 viendra compléter les premières informations obtenues lors de la campagne précédente et traitées cette année. L’analyse en réseau de l’ensemble des dispositifs à 5 ans pour la hauteur, et de ceux mesurés à 8 ans pour la hauteur et la circonférence nous fournit une vision globale de la survie et de la croissance sur l’ensemble du réseau et a permis de comparer les performances juvéniles des 9 provenances dans divers types de milieux plus ou moins favorables au Douglas. La croissance est variable selon le milieu, et d’autant plus grande que le milieu est favorable. Au bout de 5 ans, le calcaire ne semble pas avoir d’influence sur les jeunes plants. Au niveau des variétés, Californie accuse un sérieux retard sur les autres, toutes regroupées en tête et supérieures au témoin. Ce n’est que dans les dispositifs les plus secs que les écarts se resserrent et que, malgré une croissance globale très faible, elle tire son épingle du jeu. De plus, ce rapport présente les résultats obtenus à 5, 8 ou 12 ans dans 11 dispositifs ONF, CNPF et INRAE. Faute de temps, les analyses prévues dans 5 autres dispositifs sont reportées a programme de la convention suivante. Ils viennent renforcer les conclusions déjà établies, tant d’un point de vue spatial en élargissant le nombre de sites mesurés que d’un point de vue temporel en s’inscrivant dans la continuité des mesures antérieures. Californie accuse toujours un fort déficit de croissance en hauteur et circonférence par rapport aux autres variétés, malgré quelques exceptions à étudier de plus près. Son état sanitaire reste également préoccupant dans certains sites (dessèchements de cime, jaunissement de feuillage, perte d’aiguilles). L’article en préparation pour les Rendez-vous Techniques de l’ONF qui valorise les premiers résultats de croissance à 5 ans est sur le point d’être publié. 4 Caractérisation des sites d’essais Lors de la mise en place du réseau d’évaluation, les sites expérimentaux ont été classés dans quatre grands types de milieux - coeur de l’aire, marges climatiques modérée et sévère, altitude - en s’appuyant sur des simulations d’enveloppes biogéographiques. La pertinence de ce découpage étant discutable au vu des hauteurs moyennes et des hauteurs dominantes mesurées cinq ans après plantation, les partenaires ont entrepris de caractériser plus précisément les sites expérimentaux. Plusieurs sources de données ont été mobilisées : le modèle climatique SAFRAN de Météo-France et les outils de diagnostic climatique BioClimSol développé par le CNPF et Climessences du RMT Aforce. INRAE a retenu les données SAFRAN, a priori plus pertinentes car représentant le climat durant la période d’activité des dispositifs, pour positionner les sites du réseau le long de gradients climatiques. Si l’on considère la température et la pluviométrie, annuelles ou restreintes à la saison de végétation, les sites d’altitude et de marge 2 s’individualisent nettement tandis que les sites du coeur de l’aire et de marge 1 occupent une position intermédiaire. Toutefois, ces deux groupes s’interpénètrent largement. Si l’on croise la température et le bilan hydrique climatique durant la saison de végétation, on observe un continuum plus clair et plus conforme au découpage initial en cinq milieux. Il en est de même lorsque les sites sont positionnés en fonction des résultats de l’analyse en composantes principales intégrant l’ensemble des données climatiques. Au vu de certains résultats, et en prenant également en compte le risque climatique des sites, il a été décidé de modifier le milieu attribué à certains sites. Le classement retenu ne saurait représenter fidèlement le gradient rencontré et la complexité des paramètres pédologiques et climatiques à intégrer, mais permet une approche simple du contraste des conditions de croissance. La première approche de la relation croissance-climat s’avère complexe, sans résultats tranchés sauf pour les conditions montagnardes. Les peuplements du coeur de l’aire et de la marge 1 s’entrecroisent, certains de la marge 2 n’accusent pas de retard. Outre le reclassement des dispositifs dans un autre milieu, un lien plus précis entre variables climatiques (lesquelles ?) et croissance reste à établir. La caractérisation pédologique des sites d’essais se poursuit, avec l’ouverture de fosses pour tenter de préciser la nature du sol comme variable de la croissance. Etude fine de la croissance radiale Les résultats disponibles sur l’accroissement en hauteur à l’âge de 5 ans montrent que le différentiel de croissance entre Californie et les autres provenances est bien moindre dans les stations chaudes et sèches que dans les milieux frais et mieux arrosés, plus favorables à l’espèce. D’autre part, plusieurs essais prouvent, ou suggèrent, que le déficit de croissance de Californie est moins marqué pour la circonférence que pour la hauteur. Dans certains contextes pédoclimatiques, Californie pourrait donc être introduite avec profit, notamment dans une démarche de diversification des ressources génétiques. Un des enjeux de l’étude de la relation croissance x station sera de préciser la ‘niche climatique’ de cette variété pour pouvoir conseiller les reboiseurs sur son aire d’utilisation. 5 Des éléments de réponse complémentaires pourront probablement être tirés des données fournies par des capteurs de déplacement très sensibles, installés dans un essai comparant Californie à La Luzette, variété plus vigoureuse et débourrant plus tardivement. Ces mesures de diamètre très précises et réalisées à des pas de temps rapprochés visent en effet à mieux comprendre la réponse des arbres confrontés à des stress hydriques et à mettre en évidence d’éventuelles différences de stratégie pour faire face à la sécheresse. La campagne 2021 a été marquée par un été pluvieux, et donc l’absence de déficit hydrique important ou persistant. Les résultats pourraient donc s’apparenter à une année témoin, sans perturbation majeure. Malgré un débourrement précoce de Californie, on observe nettement la croissance supérieure de Luzette dans ces conditions. Une analyse globale menée sur plusieurs années, de manière à couvrir un grand nombre de contextes climatiques reste indispensable pour étudier les différences de comportement entre les deux variétés. Après le site de démonstration du domaine des Barres en 2020, le dispositif en mono-arbre de Saint-Junien-la-Bregère a été mesuré début 2022 au résistographe pour qualifier la densité du bois. Les analyses seront présentées dans le prochain rapport. Mélèzes Les travaux prévus sur cette période visaient à partir de travaux d'analyse en amont des tests d'évaluation génétique : - A proposer et réaliser une première éclaircie génétique dans le verger à graines de mélèze d'Europe du Theil: celle-ci fixée au départ à 30%, ce qui enlevait 730 individus de 46 clones, a été ajustée sur le terrain en anticipant localement la 2ème éclaircie prévue: au total 999 tiges ont été exploitées durant l'hiver 2021-2022. Une deuxième éclaircie sera programmée a priori dans 3 ans mais pourrait être anticipée en fonction de la réaction du peuplement. Cette éclaircie indispensable vise à remettre en lumière les cimes des arbres de manière à favoriser l'initiation florale. - A préparer l'éclaircie génétique dans le verger à graines de mélèze hybride de 2ème génération de FD. Carnoët. Pour cela, l'analyse des 2 tests d'évaluation des composantes du verger a été réalisée et un rapport complet présente les résultats de cette variété. L'éclaircie visera à conserver 22 clones sur les 54 existants sur base de leur vigueur et forme ; elle prendra en compte l'existence de clones pleins-frères qui seront progressivement éliminés du verger. - A transformer le verger de mélèze du Japon Fond de la Montagne en un verger REVE-VERT par introduction du parent européen en sous-étage (clone 35). Préalablement à la plantation qui a eu lieu fin 2022, un gros travail de remise en état de la parcelle (débroussaillage, étêtage) a été nécessaire. - A vérifier l'identité génétique par marqueurs moléculaires des 70 clones du nouveau verger à graines de mélèze d'Europe sudetica Cazaloux. On vérifie que ceux-ci sont bien des mélèzes sudetica hormis 3 clones qui sont des hybrides sudetica x Alpes ; ils seront à surveiller vis-à-vis du chancre. - A comparer à 20 ans, après 3 éclaircies, les performances de plusieurs variétés hybrides françaises (VG Lavercantière/Barres et REVE-VERT) et européennes par rapport à un témoin de mélèze d'Europe: VG-Theil sur un site favorable (Guiscriff, Morbihan). Conciliant forte vigueur et bonne rectitude de tiges, les deux variétés hybrides françaises sortent en tête. La variété VG-Theil est 6 deux fois moins vigoureuses que celles-ci et souffre encore malgré 3 éclaircies d'une proportion de tiges flexueuses importantes (47%). - A poursuivre l'évaluation de l'impact des éclaircies sur le taux d'hybrides et les performances de plusieurs variétés hybrides contrastées pour celui-ci au départ (site de La Courtine, Creuse). Les résultats présentés dans le rapport 2020 ont été complétés cette année par ceux de la variété FP237, dont la caractérisation génétique n'avait pas pu être réalisée avant. Elle comporte un faible taux d'hybrides, 52% après la troisième éclaircie, mais dont les performances sont excellentes. Cèdre de l’Atlas L’engouement suscité par cette essence prometteuse dans un contexte de réchauffement climatique a conduit à l’installation de deux vergers à graines (20ha) à l’horizon 2022. Ce projet, piloté par INRAE (URFM), est complété par la plantation en forêt de quatre tests de descendances qui fourniront des connaissances sur la valeur génétique des composants de ces vergers. A terme, les informations collectées dans ces tests permettront de réaliser des éclaircies génétiques dans les vergers, ce qui contribuera à améliorer la qualité des MFR mis à disposition des reboiseurs. INRAE et l’ONF, qui ont planté les tests de descendances, en assurent le suivi, l’entretien et les mesures. Durant la période de référence de cette convention, les compte-rendu d’installation du test de Verdun a été rédigé. Celui de Nouzilly est reporté au programme de la convention suivante. Le suivi et l’entretien des quatre tests a été réalisé : évaluation des besoins de dégagement, protection contre le gibier. En particulier, du répulsif contre le chevreuil a été appliqué à deux reprises dans le dispositif installé début 2020 par l’ONF en FD du Chalonnais (71). Des mesures ont eu lieu dans les trois tests installés à l’intersaison 2020/21 à Plouegat-Moysan (29) (INRAE EFNO), Nouzilly (37) (INRAE GBFOR et BioForA) et près de Verdun (55) (ONF). La survie, l’état sanitaire, la hauteur des plants sont évalués un an après plantation et, rétrospectivement, la hauteur initiale à la plantation. Sapin de Bornmüller Suite à la réunion du réseau d’évaluation en mars, Sabine Girard (CNPF) se propose d’animer un groupe de travail sur l’évaluation des vergers de sapins méditerranéens, dont les premiers échanges sont prévus pour l’été 2022.