Gérer durablement les forêts de la région Centre-Val de Loire et produire du bois énergie : 6 recommandations aux acteurs - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Vidéo Année : 2021

Gérer durablement les forêts de la région Centre-Val de Loire et produire du bois énergie : 6 recommandations aux acteurs

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Nathalie Korboulewsky
Isabelle Bilger

Résumé

Développement de la pratique de coupe mécanisée par arbres entiers : Depuis dix ans, l’utilisation des plaquettes forestières est en augmentation pour répondre à la demande croissante des chaudières biomasse. En région Centre-Val de Loire, les plaquettes forestières proviennent principalement de tiges de taillis et du sous étage (70%) dans des peuplements de feuillus (>90%). Les plaquettes sont des broyats de houppiers ou d’arbres entiers de petits diamètres. Cette technique d’exploitation, dite par « arbre entier », laisse peu de rémanents au sol. Cette technique est plus efficace et moins pénible pour les opérateurs. Elle permet de valoriser des bois de faibles valeurs commerciales issus soit de coupe et de travaux sylvicoles tels que des éclaircies, des dépressages ou l’ouverture de cloisonnement, soit de peuplements pauvres ou dépérissants. Ces coupes participent à l’amélioration et au renouvellement des peuplements. Où et comment récolter durablement en région Centre ? Le projet Defiforbois, porté par INRAE a permis de décliner pour la région Centre-Val de Loire les recommandations nationales (cf. Clé pour Agir de l’Ademe). Les coupes par arbres entiers, ou l’exploitation des houppiers exportent la plupart des branches et brindilles qui sont généralement laissées au sol dans les exploitations plus conventionnelles. Cet export accru de biomasse risque de diminuer la fertilité des sols et de supprimer des habitats pour la biodiversité, ce qui peut être contraire à la gestion durable des forêts surtout si le sol est pauvre ou sensible. Assurer une récolte durable en respectant les recommandations. La fertilité des sols et la biodiversité seront ainsi conservés. 1-Privilégier la VALORISATION de bois d’œuvre et de bois d’industrie Avant de réaliser une coupe par arbres entiers pour le bois énergie, il faut s’assurer que les bois ne peuvent pas être valorisés comme bois d’œuvre et bois d’industrie. Utiliser le bois pour la construction et l’industrie permet un stockage du carbone efficace et long (de 20 ans pour le bois dans l’ameublement à plus de 100 ans parfois dans la construction). De plus, le façonnage en parcelle laisse plus de menus bois au sol. 2- S’assurer que votre sol peut tolérer un export des menus bois Les sols forestiers de la région Centre-Val de Loire sont souvent acides, la moitié a un pH inférieur à 5,5. Une large proportion (35%) a des humus assez épais de type Moder, une texture sableuse (41% d’entre eux), et souvent un manque de potassium (K), de phosphore (P), de magnésium (Mg) et d’azote (N). Ils sont donc peu fertiles et sensibles aux prélèvements de biomasse. A l’inverse des ornières visibles immédiatement, une perte de fertilité des sols ne se manifeste qu’après plusieurs années voire plusieurs coupes. En région Centre Val de Loire, on peut distinguer trois classes de sols à partir de leur texture dans les 10 premiers cm : -Les sols à dominante sableuse : Ils sont très sensibles car les stocks de nutriments dans le sol sont insuffisants pour qu’une coupe par arbres entiers soit sans risque d’appauvrissement. La récolte par arbres entiers y est fortement déconseillée. En une seule coupe, l’exportation de nutriments serait supérieure au stock du sol (dans les 10 premiers cm du sol). De plus, la reconstitution du stock de nutriments sur ces sols est long. L’exportation de biomasse aurait un effet néfaste sur le long terme. -Sols à dominante argileuse : ceux sont les sols les moins sensibles car les stocks de nutriments dans le sol sont plus importants que dans les autres types de sols. - Les autres sols, peuvent être de très sensibles à moyennement sensibles. Un diagnostic des volumes coupés est nécessaire. 3- Récolter les arbres hors feuilles, Les branches sont 2 à 3 fois plus concentrées en éléments minéraux et les feuilles jusqu’à 7 fois plus que les troncs. Par exemple la concentration en azote varie de 3 g/kg pour le bois fort à 8 g/kg pour les menus bois, et atteint 22 g/kg pour les feuilles. Les rémanents, en se décomposant, permettent un retour au sol de nutriments et de matières organiques. Ces retours sont primordiaux pour préserver la fertilité, le bon fonctionnement biologique, la circulation de l’air et de l’eau dans le sol. Pour éviter l’export de nutriments avec le feuillage, veillez à récolter les arbres hors feuilles en décalant la période de récolte en hiver si la portance du sol le permet. De plus, le taillis repousse mieux avec des coupes hors feuilles. Si la coupe a lieu en feuilles, laisser les arbres coupés plusieurs mois sur la parcelle pour qu’un maximum de feuilles tombent au sol. Pour le chêne, plus de 6 mois sont nécessaires. Cela permet d’améliorer la qualité des plaquettes en réduisant le taux de cendres. 4- Laisser davantage de menus bois au sol pour une coupe vertueuse vis à vis de la protection des sols En région CVDL, et selon les pratiques actuelles, les 2/3 des coupes par arbres entiers laissent au sol moins de 10% de menus bois. Il faut donc laisser plus de rémanents qu’actuellement. Ce pourcentage de menu bois à laisser au sol peut être de 10 à 30%, voire davantage selon la fertilité du sol et le volume de bois coupé. Pour déterminer le pourcentage de menus bois à laisser au sol, il faut tenir compte de plusieurs paramètres. Pour vous aider, le guide Ademe sous format papier ou l’application en ligne Défiforbois vous permettent en 2 à 5 questions simples d’identifier les facteurs de sensibilité de votre sol et le % de menus bois minimal à laisser au sol. 5- Adapter les volumes coupés Le prélèvement de nutriments avec la biomasse est doublé suite à une coupe par arbres entiers par rapport à une coupe conventionnelle qui exporte uniquement le bois fort. Ces exports par arbres entiers peuvent largement dépasser le stock de nutriments des 10 premiers cm du sol, même sur des sols peu sensibles de la région. Dans ce cas, la fertilité du sol sera appauvrie. Quel que soit votre sol, la quantité de biomasse exportée, sur une période de 10-15 ans, doit être raisonnée en fonction du peuplement et du stock de nutriments du sol. L ‘outil d’aide à la décision, Défiforbois, a été élaboré pour vous aider. Le principe est de calculer, à partir de quelques variables d’entrée simples, le volume de bois exportable afin d’assurer le maintien de la fertilité du sol. Ce volume dépend du stock du sol et de la composition du peuplement. Dans tous les cas, laisser des bosquets ou des tiges de petits diamètres permet de conserver un couvert végétal qui réduit la pression du gibier sur les semis. 6- Laisser des pièces de bois pour la biodiversité Conserver des bois pour la biodiversité Laissez au sol les bois morts préexistants à la coupe, c’est-à-dire les troncs et souches déjà présents au début du chantier. Maintenez la biodiversité de vos forêts en conservant plus de 10% des menus bois au sol et quelques billons issus de la coupe. Les rémanents, menus bois ou gros rondins, sont des habitats potentiels pour des végétaux ou des animaux forestiers. Ces bois constituent donc un réservoir unique de biodiversité : dans les forêts métropolitaines, une espèce sur quatre dépend de la présence de bois mort pour tout ou partie de leur cycle de vie. Maintenez des arbres intéressants pour la faune, par exemple des arbres fruitiers ou des arbres à cavités, et veiller à ne pas perturber les milieux sensibles . Conserver des îlots Sur les parcelles de plus de 3 ha, si les rémanents sont trop gênants pour les travaux sylvicoles suivants, laisser un îlot de 300 à 500 m². L’îlot pourra perdurer ou être déplacé sur une autre zone à la révolution suivante. Ce MotionDesign est issu du travail collectif de scientifiques et d’acteurs de la région Centre Val de Loire qui ont analysé ces nouvelles techniques de récolte du bois énergie, leurs impacts sur la fertilité du sol et la biodiversité. Ces travaux ont été menés de 2016 à 2020 dans le cadre du projet DEFIFORBOIS, coordonné par INRAE. Le projet a bénéficié d’un soutien financier du Conseil régional Centre-Val de Loire et du programme PSDR4 d’INRAE.

Dates et versions

hal-04452025 , version 1 (12-02-2024)

Licence

Paternité - Pas d'utilisation commerciale - Pas de modification

Identifiants

  • HAL Id : hal-04452025 , version 1

Citer

Nathalie Korboulewsky, Isabelle Bilger. Gérer durablement les forêts de la région Centre-Val de Loire et produire du bois énergie : 6 recommandations aux acteurs. 2021. ⟨hal-04452025⟩
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