Modéliser la dynamique d’infection virale intra-vecteur et prédire son impact sur le risque de propagation des arbovirus
Résumé
Les arbovirus sont des agents pathogènes transmis aux vertébrés par piqûre d’arthropodes vecteurs. Souvent d’origine zoonotique (i.e., les hôtes peuvent être des animaux et des humains), les arbovirus représentent une menace mondiale en santé publique vétérinaire. Leur transmission est un processus dynamique et multi-échelles, de l’acquisition du virus par le vecteur à sa propagation dans les populations hôtes. Cependant, la dynamique d’infection virale intra-vecteur (DIV) et sa variation avec l’environnement (a)biotique restent mal comprises. La DIV est intégrée de manière simpliste dans les modèles épidémiologiques, empêchant d’évaluer l’impact de sa variabilité sur la dynamique virale populationnelle. Les UMR BIOEPAR et IVPC collaborent dans le projet ArboMod (financement DSA, 2022) pour connecter approches expérimentales in insecta et modélisation autour de la capacité du vecteur à s’infecter, disséminer, puis transmettre le virus selon les contraintes (a)biotiques du pathosystème. Notre objectif est de mieux comprendre la variabilité de la DIV et son impact sur les dynamiques épidémiques. Le cas d’étude est le virus de la fièvre de la vallée du Rift (RVFV), un arbovirus zoonotique circulant en Afrique et dans l'Océan Indien, et menaçant l’Europe. Des cohortes de 30 moustiques exposés au RVFV (une dose, une souche virale, une température) ont été disséquées à dates régulières pour identifier le stade d’infection (VEE : exposé, VEI : infecté, VED : disséminé, VI : infectieux) de chaque individu, selon les barrières franchies : barrière d’infection (virus dans l’intestin : de VEE à VEI) et barrière de dissémination (virus dans le système circulatoire : de VEI à VED). La barrière de transmission (virus dans la salive : de VED à VI) n’a pas été analysée. Un système d’équations aux différences spécifiant une distribution non exponentielle de la durée dans chaque stade d’infection et générique à tout virus infectant des moustiques a été co-construit. Les distributions des durées dans les états VE, VEI et VED+VI ont été estimées par une méthode ABC (Approximate Bayesian Computation). Nous avons mis en évidence un écart à l’hypothèse exponentielle de durée entre l’infection et la dissémination dans le vecteur. Nous avons évalué l’impact de cette différence sur la dynamique épidémique populationnelle avec un modèle existant pour le RVFV, dans lequel les états du vecteur ont été remplacés par notre modèle de DIV. Notre modèle permettra à terme d’identifier les données expérimentales nécessaires pour mieux caractériser la DIV et la transmission vectorielle. D’autres formalismes mathématiques seront explorés pour améliorer la performance de ce modèle épidémiologique multi-échelles