L’utilisation de produits résiduaires organiques (PRO) tels que les boues de station d’épuration, fumiers, lisiers, digestats ou composts, comme substitution aux fertilisants azotés ou phosphorés conventionnels permet de valoriser ces matières dans une logique d’économie circulaire et participe à la réduction des coûts environnementaux et économiques liés aux intrants de synthèse. Cependant, les PRO peuvent contenir une grande diversité de contaminants traces organiques (CTO). Ces CTO appartiennent à différents groupes, comme les polluants organiques persistants (POP), les contaminants organiques émergents (COE) ou encore les produits pharmaceutiques et de soins personnels (PPCP). Le devenir dans les sols de ces contaminants a principalement été étudié dans un contexte de climat tempéré, mais peu ou pas de données sont disponibles sur leur devenir dans un contexte tropical 1,2. Or, le type de sol et ses propriétés, les précipitations et la température, en plus des caractéristiques intrinsèques du contaminant et du PRO jouent un rôle majeur dans leur devenir 3,4. Sur le site du SOERE PRO (Systèmes d'Observation et d'Expérimentation au long terme pour la Recherche en Environnement) de La Réunion, 123 CTO ont été suivis dans les PRO et les sols pendant 8 années de culture de canne à sucre afin de quantifier au champ les flux entrants et leur potentielle accumulation dans les sols. Nos hypothèses sont les suivantes : (i) le temps de dissipation apparent des CTO est plus court en condition tropicales ; (ii) la contamination préexistante à la mise en place de cet essai au champ est principalement marquée par la présence de POP, caractérisés par un faible taux de dissipation, (iii) les flux de PPCP et de COE via les PRO sont plus importants que pour les POP car une partie des POP sont maintenant interdits ou leurs usages sont encadrés, (iv) la typologie des contaminants varie en fonction du type de PRO. Des flux importants de POP et de COE sont observés pour certains composés ou certaines familles de composés mais il n’y a peu ou pas d’accumulation dans les sols. Seuls certains retardateurs de flamme, les polybromodiphényléthers s’accumulent de manière significative dans les sols sur lesquels des boues de station d’épuration sont épandues. Concernant les PPCP, seules les quatre premières années d’analyses sont disponibles. Alors que ces composés étaient totalement absents des sols à T0, certains d’entre eux sont détectés après 1 à 4 épandages selon les modalités (e.g. la ciprofloxacine et la doxycycline).