De l’évacuation à l’impossible marchandisation : épreuves et débordements d’une boue industrielle encombrante et toxique
Résumé
The production of alumina using the Bayer process generates toxic residues – “the red mud” – which constitute one of the largest volumes of industrial waste in the world. As alumina production increases, so does the volume of toxic residues with no market value. What to do with these production leftovers? How can they be requalified and valorized? In the case studied here at the Gardanne site (Bouches-du-Rhône, France), the industrial operator embarked on a Research & Development program at the turn of the 1990s to requalify and market these muds as a new resource. But making a marketable product out of a pile of toxic mud does not follow a linear process. The commodification strategy developed by the company will have to contend with technical, regulatory, economic, political and territorial constraints. We show that these constraints are interdependent and overlap in the key test faced by the engineers, that of mastering materiality.
La production d’alumine via le procédé Bayer génère des résidus toxiques – les « boues rouges » – qui constituent en volume un des plus importants déchets industriels au monde. Plus la production d’alumine s’accroît, plus cette part de résidus potentiellement toxiques et sans valeur marchande augmente. Que faire de ces restes de la production ? Comment les requalifier et les revaloriser ? Dans le cas étudié ici du site de Gardanne (Bouches-du-Rhône, France), l’exploitant industriel a entamé au tournant des années 1990 une démarche de Recherche & Développement destinée à la requalification et la valorisation marchande de ces boues en une ressource nouvelle. Mais faire d’un tas de boue toxique un produit commercialisable ne répond pas à une trajectoire linéaire. La stratégie de marchandisation développée par l’industriel va faire face à des contraintes techniques, réglementaires, économiques, politiques et territoriales. Nous montrons que ces contraintes sont interdépendantes et se recoupent dans l’épreuve clé que rencontre l’ingénierie, celle de la maîtrise de la matérialité.
