La thèse étudie théoriquement et empiriquement la gestion des services écosystémiques par les agriculteurs sous l’angle de la théorie économique. Le concept de services écosystémiques est un concept interdisciplinaire désignant « les services qu’offrent gratuitement la nature à l’homme ». La littérature économique s’est principalement emparée de la question de la mesure de la valeur de ces services, en s’intéressant peu ou prou aux comportements des agents modifiant ces services. La thèse se divise en deux parties. Dans la première partie, je m’intéresse à l’offre et à la demande de service écosystémique productifs (par exemple, la pollinisation ou le contrôle biologique) en analysant le comportement des agriculteurs, considérés comme de potentiels gestionnaires des agroécosystèmes. Inspiré par la littérature en écologie du paysage, j’introduis des indicateurs de biodiversité dépendant des assolements dans des modèles existants issus de la littérature en économie de la production appliquée à l’agriculture. Ce rapprochement fournit un modèle théorique unifié où l’on peut analyser les choix des agriculteurs vis-à-vis des services écosystémiques productifs. Les travaux empiriques développés par la suite consistent à estimer toute ou partie de ce modèle théorique. Ma principale contribution à la littérature est de prouver, à partir de l’analyse des comportements observés des agriculteurs, que les agriculteurs gèrent consciemment les services écosystémiques productifs. J’apporte d’autres éléments à la littérature, en fournissant notamment des éléments importants sur la technologie agricole lorsque les services écosystémiques productifs sont considérés, ou en montrant que la gestion collective des services écosystémiques productifs ne peut que rarement émergée spontanément dans des paysages réels où les agriculteurs sont hétérogènes. Dans la deuxième partie, je m’intéresse à la demande pour les biens publics fournis conjointement par les agriculteurs via la modification des flux de services écosystémiques, i.e. je m’intéresse à la demande pour les services environnementaux fournis par les agriculteurs (au sens de Engel et al., 2008). En particulier, j’étudie le rôle de l’échelle géographique de la demande sur la conception de politique agro-environnementale. En effet, si les biens publics locaux vont influencer le bien-être des agents au sein d’une zone géographique délimitée (e.g. amélioration de la qualité de l’eau en maintenant une zone humide en amont d’une station de traitement), les biens publics globaux peuvent influencer le bien-être de l’ensemble des agents (e.g. séquestration du carbone dans une zone humide). Dans cette partie, j’applique les cadres d’analyse de plusieurs littératures développées en économie de l’environnement (par exemple, vi la littérature sur le fédéralisme environnemental ou sur le « distance-decay ») aux spécificités des services environnementaux fournis par l’agriculture ; en particulier, le service environnemental fourni par un agriculteur influe le plus souvent sur la fourniture de multiple biens publics, biens publics dont l’échelle de la demande diffèrent. Je contribue à la littérature en montrant que, bien que la plupart de la demande pour les services environnementaux fournis par les agriculteurs soit capturée localement (à l’échelle de la municipalité), une partie de la demande s’exprime à des échelles plus importantes. Cela a des implications pour la gouvernance et la conception des politiques agroenvironnementales, que j’explore à travers deux exemples : la réduction de l’application des pesticides et le maintien des zones humides agricoles.