Plusieurs crises agricoles doivent être distinguées en fonction des dynamiques sectorielles et territoriales dans lesquelles sont insérées les exploitations, mais aussi en fonction des institutions (règles, normes, organisations) qui stabilisent localement ces deux dynamiques et permettent la coordination entre les agents. L'ensemble du travail repose sur le cadre théorique de l'économie institutionnaliste qui distingue fondamentalement, d'une part les flux économiques quantifiables, et d'autre part les institutions qui orientent les actions des agents économiques. Dans une première partie, la quantification des mouvements économiques agricoles permet de "périodiser" la crise agricole régionale, de révéler ses spécificités vis-à-vis des évolutions nationales, puis de mettre en évidence au sein de la région plusieurs systèmes agricoles localisés touchés par des crises dont les rythmes économiques sont différents. Dans une seconde partie, un modèle conceptuel est proposé pour interpréter ces crises agricoles en introduisant explicitement les institutions dans l'analyse économique. Ce modèle "hol-individualiste" est appliqué pour expliquer l'éclatement et la recomposition du système viticole languedocien, puis les transformations de trois autres systèmes productifs (Lauragais, Margeride et Gard). Il apparaît bien, que les systèmes productifs agricoles hérités de la période de modernisation agricole sont déstabilisés, à la fois par la succession des crises sectorielles et par les transformations affectant leurs territoires. Les recompositions en cours témoignent également de l'importance des institutions qui orientent localement les actions économiques des agriculteurs, notamment parce qu'elles jouent sur les processus d'innovation et sur les actions collectives entreprises pour sortir de ces crises.