L’épigénétique, la nouvelle biologie de l’histoire individuelle ? - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Revue française des affaires sociales Année : 2013

L’épigénétique, la nouvelle biologie de l’histoire individuelle ?

Résumé

Les auteurs, respectivement neurobiologiste et neuroendocrinologue, proposent ici des éléments de réponses aux questions que posent les travaux qui impliquent l’épigénétique. Depuis le milieu du xixe siècle, la biologie est convoquée pour expliquer la transmission d’une génération à l’autre des traits de caractères et des pathologies mentales. Le célèbre aliéniste Bénedict Augustin Morel développa en 1857 la théorie de la dégénérescence. Pour lui, par exemple, un « crétin des Alpes » était le dernier rejeton d’une longue lignée d’individus de plus en plus dégénérés. Confronté à l’hypothèse (correcte) selon laquelle cette débilité serait due à un manque d’iode, il la rejeta comme absurde. L’avènement de la biologie moléculaire il y a une trentaine d’années, puis le séquençage du génome humain, ont suscité de grands espoirs pour l’identification des facteurs génétiques influençant les pathologies mentales. Les découvertes initiales ont souvent été relayées de façon exagérée par certains médias. En réalité, les études de génétique quantitative montrent maintenant que l’influence des gènes varie de faible à modérée selon les pathologies mentales et les familles. De plus, la plupart des troubles mentaux sont hétérogènes et de multiples gènes ainsi que de nombreux facteurs environnementaux sont impliqués dans leur étiologie. Ceci se traduit par un effet faible de chaque gène pris individuellement et par une interaction forte entre gènes et environnement (Sonuga-Barke, 2010). Tant du point de vue du diagnostic que de la recherche de nouveaux traitements, ces observations sont donc d’une portée limitée (Evans et al., 2011 ; Gonon, 2011), mais elles pourraient tout de même permettre de préciser certains mécanismes neurobiologiques impliqués dans ces pathologies. Plus récemment, la transmission de caractères acquis, évoquée par Lamarck dès 1809, a refait surface dans le domaine de la psychiatrie à travers l’étude des mécanismes épigénétiques. Cette position commence à être relayée par certains médias. Ainsi, dans le journal Marianne du 11 août 2012, on peut lire : « Aujourd’hui, on est revenu à plus de mesure : le “tout-génétique” a perdu de sa superbe et on évoque de plus en plus les phénomènes épigénétiques. C’est-à-dire comment l’environnement et l’histoire individuelle influent sur l’expression des gènes, ou plus précisément sur l’ensemble des modifications transmissibles d’une génération à l’autre. » De fait, l’épigénétique a envahi de nombreux domaines des sciences biomédicales, comme la cancérologie ou l’immunologie. Concernant les neurosciences et la psychiatrie, le nombre d’études impliquant l’épigénétique est passé de 43 en 2001 à 575 en 2011. Le but de cette contribution n’est donc pas de présenter une synthèse de ces travaux, mais de proposer quelques éléments de réponse provisoires aux questions scientifiques, médicales et sociales qu’ils soulèvent.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02643330 , version 1 (28-05-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02643330 , version 1
  • PRODINRA : 256423

Citer

François Gonon, Marie-Pierre Moisan. L’épigénétique, la nouvelle biologie de l’histoire individuelle ?. Revue française des affaires sociales, 2013, 2013/1-2 (1-2), pp.21-31. ⟨hal-02643330⟩
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