Changements de pratiques et systèmes agricoles pour l'amélioration de la qualité de l'eau. Performance environnementale de l'AB vs AC et reconnexion élevage et grande culture - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2015

Changements de pratiques et systèmes agricoles pour l'amélioration de la qualité de l'eau. Performance environnementale de l'AB vs AC et reconnexion élevage et grande culture

Gaëlle Tallec

Résumé

Depuis l'après-gurerre, l'usage des engrais de synthèse dans l'agriculture a contribué à des fuites accrues d'azote dans l'environnement, provoquant en particulier une contamination des eaux de surface et des aquifères, ainsi que des émissions de gaz à effet de serre (N2O et NH3), (Benoit et al., 2015 en révision) dont les conséquences négatives sur la santé humaine et la biodiversité sont reconnues. L'ouverture du cycle de l'azote s'est aussi manifestée par une spécialisation agricole (soit en grandes cultures soit en élevage), tant à des échelles continentales que régionales. Le bassin de la Seine est typiquement une région céréalière intensive où l'accroissement des teneurs en azote dans les eaux a été clairement relié à l'application de fertilisants, avec une déconnexion complète du cheptel désormais relégué à la périphérie du bassin, mais surtout dans le Grand Ouest. Pour protéger l'environnement (éviter la fermeture des captages d'eau potable, réduire l'eutrophisation côtière, etc.), un enjeu du 21ème siècle est de s'acheminer vers des formes nouvelles d'agriculture plus respectueuses de l'environnement. La diminution des intrants et leur fractionnement, ou autres mesures agro-environnementales (volontaires et/ou réglementaires), s'ils ont permis de ralentir la tendance à l'augmentation des impacts agricoles, ne permettront pas de concilier la production agricole et la production d'une eau de qualité pour l'alimentation et l'environnement. L'agriculture biologique apparaît donc désormais comme une alternative crédible à l'agriculture conventionnelle, à tel point que la Loi Grenelle préconise un plan BIO visant à atteindre d'ici 2020, 20% des surfaces agricoles cultivées selon le cahier des charges du bio (sans pesticide, sans fertilisant de synthèse). Les performances de l'agriculture biologique du point de vue des pertes azotées, qui avaient fait l'objet de très peu de publications en France au début de la phase 6 du PIREN-Seine, ont été appréhendées avec l'objectif d'évaluer leur capacité à concilier production agricole et qualité de l'eau. Nous avons ainsi équipé des parcelles agricoles en bougies poreuses (10 itinéraires techniques en agriculture conventionnelle -AG-, 8 en agriculture biologique - AB- en différents pôles climatiques du bassin de la Seine) pour quantifier les fuites d'azote dans les aquifères (Benoit et al., 2014). Nous avons aussi analysé les surplus agricoles (entrées et sorties à l'échelle des rotations) sur la base d'enquêtes auprès d'exploitations en AB (68 systèmes de culture dans 53 exploitations) comparées avec les rotations conventionnelles les plus fréquentes des mêmes régions (82 systèmes de culture renseignés dans la base de Données ArSeine, Puech et al., 2014) (Anglade et al., 2015, en révision). A l'échelle des exploitations, nous avons montré que les concentrations sous-racinaires sous AB sont en moyenne de 30 % inférieures à celles de l'AC avec des intrants totaux (incluant la fixation symbiotique, Anglade et al. 2015) globalement de 30 % moindre, mais des intrants exogènes bien inférieurs en AB qu'en AC (Benoit et al., 2014). La relation qui lie le rendement et les intrants totaux est similaire dans les deux systèmes (Anglade et al., 2015, en révision). Nous avons montré d'autre part que sous terres arables, 70 à 75 % du surplus est effectivement lixivié. Ces résultats permettent, avec le modèle Riverstrahler, de simuler à l'échelle du bassin de la Seine, l'effet sur la contamination azotée de différents scénarios de modification des pratiques agricoles, allant de la généralisation des CIPAN jusqu'à une généralisation de l'agriculture biologique avec reconnexion de l'élevage dans les zones de grandes cultures où il avait pratiquement disparu. Les résultats montrent que des changements radicaux sont nécessaires pour atteindre les objectifs ambitieux qui ont été fixés en matière de qualité des eaux. La même démarche de modélisation et de scénarisation a été appliquée à une résolution spatiale beaucoup plus fine à l'échelle du petit bassin agricole de l'Orgeval (104 km2) (Garnier et al., 2014). Le bilan d'une exploitation conventionnelle à rotation courte (3-4 ans Blé/Maïs/Blé/féverole) conduit à un surplus d'environ 45 kgN/ha/an, soit environ une concentration sous-racinaire de 25 mgN/L en considérant la lame d'eau moyenne pour la région. En agriculture biologique avec une rotation de 8 ans (Luzerne/luzerne/blé/céréale de printemps/féverole/blé/céréale de printemps/lin), le surplus diminue à 25 kgN/ha/an qui donne lieu à une concentration sous racinaire de 15 mgN/L. En prenant en compte ces valeurs comme des contraintes au modèle Riverstrahler, on obtient une diminution de 25 à 35 % des concentrations nitriques dans l'eau à l'exutoire du bassin (soit un différentiel de 3 à 4 mgN/L). Un scénario de reconnexion de l'élevage, traditionnel dans cette région de la Brie laitière, permet de réduire encore le surplus (15 mgN/ha/an), de même que la contamination nitrique des eaux. Par ailleurs, l'examen du bilan financier d'une exploitation mixte (AB et AC) montre que les deux systèmes produisent des revenus nets tout à fait similaire en dehors des aides. Au total, nous avons montré que les systèmes en AB du bassin de la Seine peuvent contribuer à améliorer la qualité de l'eau, même si les effets ne peuvent être immédiats compte tenu du temps de résidence des eaux dans les aquifères. Toutefois, si les systèmes conventionnels présentent encore une marge d'amélioration du point de vue des pratiques (ex. généralisation de CIPAN), les systèmes biologiques peuvent aussi largement être optimisés (par ex. meilleure gestion de la luzerne et des engrais organiques).
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02743967 , version 1 (03-06-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02743967 , version 1
  • PRODINRA : 306571

Citer

Josette Garnier, Juliette Anglade, Marie Benoit, Gilles Billen, Paul Passy, et al.. Changements de pratiques et systèmes agricoles pour l'amélioration de la qualité de l'eau. Performance environnementale de l'AB vs AC et reconnexion élevage et grande culture. Colloque 2015 du PIREN-Seine, Université Pierre et Marie Curie - Paris 6 (UPMC). FRA., 2015, Paris, France. 74 p. ⟨hal-02743967⟩
124 Consultations
0 Téléchargements

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More