L'objectif de cet article est d'analyser les fondements et mécanismes des marchés d'un bien de qualité, le vin, en associant l'économie et la sociologie à partir des travaux d'Harison White. Nous proposons une démarche qui combine deux de ses apports : son approche interactionniste des structures sociales, qui nous permet d'introduire la notion de "système de marché" ; son modèle formalisé des marchés de production dont nous proposons un usage heuristique. Nous complétons ces apports par l'économie des conventions et confrontons notre cadre d'analyse aux données empiriques économiques et sociologiques produites dans le secteur viticole languedocien, au niveau régional puis local. Nos analyses amènent à confirmer les hypothèses de White et des conventionnalistes sur deux plans : les trois catégories de vins saisies à l'échelle régionale (AOC, cépage, table) correspondent à différents types de marché modélisés par White et aux conventions associées ; au sein d'un cluster viticole, les entreprises se répartissent selon une distribution chiffre d'affaire/volume cohérente avec leurs choix de production. Toutefois, nous montrons qu'une catégorie instituée de vins regroupe en fait une grande diversité de marchés et de conventions ; nous affinons également l'hypothèse de White plaçant les observations réciproques entre entreprises au fondement des marchés, à partir d'une analyse systématique des réseaux entre dirigeants des firmes vitivinicoles. La discussion ouvre à la fois sur le domaine de validité du modèle de White, les approfondissements possibles en économie et sociologie économique, mais aussi sur l'intérêt de son approche pour analyser la crise viticole actuelle et accompagner la création d'un nouveau marché.