Selon la plupart des modèles mondiaux, notamment ceux développés par les institutions internationales (OCDE, Banque mondiale, OMC), la libéralisation des échanges réduirait la pauvreté et l'insécurité alimentaire prévalant dans les pays en développement. L'article montre que cette vision optimiste du fonctionnement des marchés libres s'appuie sur des hypothèses simplificatrices qui ne correspondent pas, de l'aveu même des scientifiques travaillant sur ces modèles, à la réalité de l'économie mondiale. Il présente ensuite les résultats du modèle ID3, construit en introduisant l'imperfection de l'information sur les marchés agricoles. Ce modèle alternatif donne une image toujours schématique mais plus réaliste où l'on retrouve l'instabilité des prix et des volumes caractéristiques des marchés et des économies agricoles. Il montre aussi que la volatilité des prix, en engendrant des erreurs d'anticipation, risque de réduire à néant les gains de la libéralisation, car la succession de phases de hausse et de baisse des valeurs ajoutées agricoles et des PNB des pays se traduit à long terme par un résultat globalement négatif qui affecte surtout les plus pauvres. Ce modèle démontre que, si l'on ne peut nier l'intérêt de l'échange international, on ne peut nier non plus l'intérêt de politiques de stabilisation pour réduire les fluctuations des prix des produits de base et améliorer les revenus des agriculteurs, lesquels forment le gros des populations pauvres dans les pays en développement.