La spécialisation croissante des systèmes de production européens de ces dernières décennies s’est appuyée sur une artificialisation des milieux, et un usage croissant des fertilisants notamment minéraux, au dépens des sols et de leur protection. Pourtant, la fertilité des sols reste un enjeu majeur pour produire aussi bien des denrées alimentaires que des fourrages. Sur l’installation expérimentale INRAE de Mirecourt, nous conduisons depuis 2006 des expérimentations systèmes « bovin lait » biologiques dans une logique stricte d’autonomie (pas d’achat de fourrages ni de fertilisants organiques). La fertilité des sols a été suivie par des analyses de terre tous les 4 ans sur 33 points de mesure sur prairies permanentes. Dans cette communication, nous proposons une méthode originale pour caractériser la dynamique de la fertilité chimique des sols en prairie permanente via une analyse multivariée sur les principaux composants chimiques des sols (Carbone organique, N, P, K, pH et CEC). Nous montrons sur la période 2006-2018 que dans ces systèmes très autonomes : (i) la fertilité chimique des sols augmente, (ii) la dynamique n’est pas linéaire et alterne des phases d’amélioration et de dégradation de la fertilité, (iii) les amplitudes sont plus importantes sur les sols avec une meilleure fertilité en 2006 et (iv) la fertilité s’améliore sur les sols les moins fertiles en 2006 et est globalement stable sur les sols les plus fertiles en 2006. Si ces résultats n’offrent qu’une vision partielle de la qualité des sols (fertilité chimique), la méthode proposée permet d’apprécier les dynamiques pluriannuelles avec une approche multifactorielle. Les relations avec les autres dimensions de la qualité des sols (physique, biologie) et les liens avec les conduites (apports organiques, conduites de pâturage) restent toutefois à explorer.