Quels changements de consommation pour une alimentation plus durable en Tunisie ?
Résumé
Introduction et but de l’étude: Comme plusieurs pays méditerranéens, la Tunisie a connu une transition épidémiologique et nutritionnelle aboutissant à une augmentation de l'obésité et des maladies associées. Elle fait aussi face à des enjeux environnementaux comme la gestion des ressources en eau et l'érosion des sols. Il est urgent de promouvoir des régimes alimentaires durables, i.e. nutritionnellement adéquats, abordables, culturellement acceptables et ayant un faible impact sur l'environnement. L'objectif de l'étude était d'identifier les changements alimentaires nécessaires pour respecter les recommandations nutritionnelles sans augmenter l’impact environnemental de l’alimentation, tout en s’éloignant le moins possible des consommations actuelles afin de respecter les habitudes alimentaires de la population Tunisienne. Matériel et méthodes: Les apports nutritionnels ont été estimés à partir des données de consommations alimentaires de l'enquête nationale réalisée sur un échantillon représentatif de la population tunisienne (n=7209, 35-70 ans). L'impact environnemental des diètes a été évalué par 6 indicateurs – impact sur les ressources en eau, la biodiversité et 4 indicateurs d'utilisation des sols (résistance à l'érosion, filtration mécanique, recharge des nappes souterraines, production biotique) – évalués pour 161 aliments. Des diètes optimisées respectant l’ensemble des recommandations nutritionnelles de l’OMS et minimisant l’écart à la diète moyenne observée ont été modélisées par programmation non linéaire sous 2 scénarios: i)respect des contraintes nutritionnelles (NUTRI) et ii) respect des contraintes nutritionnelles sans augmenter l’impact environnemental observé pour les 6 indicateurs environnementaux (NUTRIENV). Résultats et Analyse statistique : Dans la diète moyenne observée, les apports en calcium, vitamine D, cuivre, fer, magnésium et potassium étaient inférieurs aux recommandations, et supérieurs dans le cas du sodium et des matières grasses. Dans le scénario NUTRI, les principaux changements alimentaires étaient une augmentation des produits laitiers (+93% en poids), féculents (+34%), fruits/légumes (+13%), poisson (+72%), œufs (+68%), et une réduction des produits sucrés (-89%), volaille (-93%) et matières grasses (-65%). L’impact environnemental était augmenté pour tous les indicateurs sauf la résistance à l’érosion et la production biotique. Ajouter une contrainte limitant l’impact environnemental à son niveau observé pour chacun des 6 indicateurs (NUTRIENV) induisait une augmentation accrue des légumes, poisson, œufs (vs. NUTRI), et une réduction de la viande rouge (-51% par rapport à l’observé). Conclusion: Une alimentation de meilleure qualité nutritionnelle peut avoir un impact environnemental plus important. Une prise en compte simultanée des dimensions nutritionnelle et environnementale est nécessaire lors de l’élaboration de recommandations. En Tunisie, les changements majeurs identifiés pour tendre vers des régimes alimentaires durables sont la réduction des produits sucrés, matières grasses, et viande au profit d’une augmentation des produits laitiers, du poisson et des œufs. Ces changements ont été traduits en options d’actions validées par les acteurs-clés en matière d’alimentation, nutrition, environnement et agriculture.
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